Mise à jour : August 2014

Classification des actes

Les actes administratifs peuvent être classés en fonction de nombreux critères.

Décision implicite / décision explicite

Pour des raisons pratiques, les décisions de l'administration ne peuvent toujours avoir une réponse explicite. Ainsi, le silence de l'administration a une signification : le silence gardé pendant plus de deux mois vaut décision implicite de rejet. L'acceptation est donc l'exception.

Actes susceptibles de recours / actes insusceptibles de recours

L'acte administratif, pour "faire grief" et donc pouvoir faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, doit être un acte juridique, ajouter au droit (modification de l'ordonnancement juridique) et présenter le caractère d'une décision exécutoire (qui suffit à porter des effets).

Les actes insusceptibles de recours peuvent avoir les caractères d'un acte administratif, mais bénéficient d'une immunité juridictionnelle ; c'est le cas des actes de gouvernement. Dans d'autres cas, le juge estime que l'acte ne satisfait pas à toutes les conditions permettant la qualification d'acte administratif ; c'est le cas des mesures préparatoires et des mesures d'ordre intérieur.

Les actes de gouvernement regroupent les actes mettant en relation le Gouvernement et le Parlement ou une entité étrangère (organisation internationale, Etat étranger). Certains de ces actes, inscusceptibles de recours, peuvent toutefois être considérés "détachables" du service, ce qui permet au juge d'apprécier leur légalité.

La mesure préparatoire est l'acte préalable à l'acte administratif, qui lui, modifie l'ordonnancement juridique.

Les mesures d'ordre intérieur s'appliquent aux services internes de l'administration et n'ont donc en principe pas d'effet juridique externe à l'administration ; il s'agit des circulaires et des directives. Cependant, la jurisprudence "Notre Dame du Kreisker" (CE Ass., 1954) avait distingué circulaires interprétatives (inscusceptibles de recours) et circulaires réglementaires (susceptibles de recours).

Actes individuels / actes réglementaires

Les actes unilatéraux révèlent la puissance de l’autorité administrative, qui impose ses décisions à une ou plusieurs personnes, ou à des catégories de personnes. Cependant, il convient de distinguer les actes individuels des actes réglementaires, et de rappeler les autorités bénéficiant d’un pouvoir réglementaire.

L’acte individuel

L'acte individuel est facile à identifier : il est édicté à l’égard d’une ou plusieurs personnes déterminées, nominativement désignées. Il peut s’agir d’un destinataire personne morale ou physique.

Il s’agit généralement de l’application d’actes réglementaires édictés en amont.

L’acte réglementaire

L'acte réglementaire est une norme générale et impersonnelle adressée à des individus non déterminés. Il peut néanmoins s’adresser à un groupe de population (à une fonction par exemple, ou aux seuls automobilistes). Il ne se distingue pas de l’acte individuel par le nombre de personnes auxquelles il s’adresse, mais par d’autres éléments caractéristiques ; les autorités bénéficiant du pouvoir réglementaire ont en effet des obligations particulières dans cette mission. Elle est par exemple obligée d’utiliser son pouvoir réglementaire dans un délai raisonnable (sous peine d'illégalité) et publier également ses décisions dans un délai raisonnable afin d’informer le public. Aussi, les règlements illégaux doivent être abrogés.

Certaines autorités administratives disposent d’un pouvoir réglementaire général, c’est dire que les actes s’appliquent sur l’ensemble du territoire et dans toutes les matières réglementaires.

Le pouvoir du premier ministre

Avant 1958, il revenait à l’ancien Président du Conseil d'exécuter les lois. Cette tâche a été transférée au Premier ministre à l’aube de la Ve République. Il est chargé de la bonne exécution des lois, sans interprétation de sa part. Les mesures d’exécution des lois doivent intervenir dans un délai raisonnable, sous peine d’astreintes par jour de retard (Association France Nature Environnement, 2000, CE).

Les règlements peuvent être pris dans toutes les matières, à l’exception de celles qui relèvent de la loi, conformément à l’article 34 de la Constitution. La Constitution de 1958 a créé un pouvoir réglementaire autonome, qui s’exerce donc sans texte législatif l'y autorisant. Cependant, ce pouvoir ne doit pas empiéter sur le domaine de la loi (il ne peut par exemple pas modifier des dispositions réglementaires prévues par une loi).

Mais le Premier ministre dispose d’un autre pouvoir, lui aussi doté d’une réelle importance : le pouvoir de police générale. L’arrêt Labonne de 1919 avait donné attribué cette compétence au chef de l’Etat, qui se l’était vu retirer par la constitution de 1958. Le Conseil d’Etat a réaffirmé qu’il appartenait au « chef du gouvernement, en vertu de ses pouvoirs propres et en dehors de toute disposition législative l’y habilitant spécialement, d’édicter les mesures nécessaires à la protection de la salubrité publique sur l’ensemble du territoire national » (CE Ass., 1960, SARL Restaurant Nicolas).

Le pouvoir du chef d’Etat

Le Président de la République dispose également d’un pouvoir réglementaire lorsqu’il signe les décrets délibérés en Conseil des ministres et les ordonnances. Les ordonnances sont prises après demande du gouvernement au Parlement, qui donne l'autorisation de les édicter. La signature du chef de l’Etat renforce son pouvoir en matière réglementaire puisqu’il peut priver le gouvernement de tous moyens pour mettre en œuvre une réforme. François Mitterrand avait ainsi utilisé ce pouvoir contre les volontés de privatisation du gouvernement pendant les années de cohabitation.

L’absence de pouvoir réglementaire des ministres

Les ministres ne disposent pas du pouvoir réglementaire. Cependant, le Premier ministre peut déléguer à un ministre une partie de son pouvoir réglementaire, tout comme le ministre peut user d’un pouvoir règlementaire en tant que chef de service ; l’arrêt Jamart de 1936, du Conseil d’Etat donnait en effet la possibilité pour les ministres de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement du ministère.

Les pouvoirs particuliers

D’autres institutions disposent d’un pouvoir réglementaire.

Les AAI

Ces autorités disposant d’une autonomie particulière, il était nécessaire de leur accorder un pouvoir qui leur permettrait de la préserver. C’est ainsi que certaines AAI sont dotées d’un pouvoir règlementaire, ce qui est notamment le cas du CSA (qui établit par exemple les règles relatives aux temps de parole des partis politiques).

L’Union européenne

L’Union européenne, par ses organes, peut prendre des mesures de caractère réglementaire. Outre les avis ou les recommandations édictées en dehors de tout cadre réglementaire, des règlements et des directives peuvent être pris dans ce cadre.

Les règlements, en droit communautaire, s’appliquent directement dans les Etats membres ; les décisions qui sont prises en droit interne doivent donc s’y conformer, en raison de l’ « effet direct » des règlements communautaires.

Les directives ne sont quant à elles obligatoires que dans leur but : elles n'obligent pas les Etats à utiliser des moyens spécifiques pour y parvenir. Les Etats se trouvent donc dans l’obligation d’arriver à l’objectif demandé, mais peuvent choisir les moyens qu'ils veulent pour l’atteindre. En revanche, la Cour de justice des communautés européennes a eu l'occasion de rappeler que les dispositions prises dans le cadre de la réalisation d'un tel objectif ne doivent pas être de nature à le compromettre.

Les organismes de droit public ou privé, les préfets et les collectivités

Les organismes chargés d’un service public disposent dans certains cas du pouvoir réglementaire. Certaines fédérations sportives ont ainsi la possibilité d'édicter les règles relatives au sport en question. Les ordres professionnels (médecins, avocats) ont également des pouvoirs similaires.

Les représentants de l’Etat disposent d’un pouvoir réglementaire pour organiser les services dont il ont la charge dans le cadre du département ou de la région. Ce pouvoir leur permet de garantir l’ordre public.

Les maires et les présidents des Conseil régionaux et généraux disposent également du pouvoir réglementaire. Le maire dispose en effet d’un pouvoir de police, ce qui le conduit à prendre toutes les mesures nécessaires au maintien ou au rétablissement de l’ordre public, dans le cadre de sa commune.