Un fort
développement des dispositifs relatifs à l’emploi a été mis en
place depuis les années 70, en réaction au chômage de masse ;
le taux de chômage est en effet passé de 2,7% au début des années
1970 à 13% en 1993.
La politique de
l’emploi concerne essentiellement certaines catégories d’individus
(jeunes non qualifiés notamment). Cette politique particulière est
établie dans le cadre de difficultés sociales ou de nécessité de
réponse rapide à une crise sociale qui menacerait l’ordre public.
L’emploi constitue en effet un secteur prépondérant pour les
individus en ce sens qu’il est synonyme d’intégration sociale.
La politique de
l’emploi reste du ressort de la compétence nationale, même si
certaines compétences en la matière sont désormais communautaires.
Ces dernières s’établissent dans le cadre de la Stratégie
européenne pour l’emploi (SEE) depuis 1997.
Objectifs
Les objectifs de
la politique de l’emploi sont variés en raison de sa complexité.
Cette politique peut en effet aussi bien agir sur le nombre
d’emplois, que sur les couts du travail.
Elle vise à
favoriser l’emploi, en créant des emplois ou en formant les
travailleurs. Dans ce cadre, on peut limiter le cout du travail, ce
qui augmente son volume (car les entreprises embauchent plus). On
peut également accroitre le nombre d’offre d’emploi en limitant la
durée de travail (travail à temps partiel).
Elle vise
également à limiter les crises de l’emploi. Dans ce cadre, les
préretraites autorisent le retrait anticipé de la vie active, ce
qui permet d’augmenter le nombre d’emplois vacants. Les formations
et les stages peuvent également permettre de faire renouer un
travailleur avec le monde du travail en lui donnant les
qualifications nécessaires pour qu’il retrouve du travail
(formation tout au long de la vie). La crise de l’emploi relève
également de l’exclusion du marché du travail ; des aides sont
ainsi apportés aux chômeurs de longue durée, susceptibles d’être
marginalisés. Sont également mises en place les primes pour
l’emploi destinées à inciter au travail.
Fondements théoriques
Les néoclassiques
Le chômage vient
selon eux des rigidités présentes sur le marché du travail. Le
salaire ne peut alors pas ajuster le marché de l’offre et de la
demande. Cela peut venir de facteurs endogènes ; c’est le cas
du salaire minimum qui fixe le salaire d’équilibre à une base qui
ne peut évoluer et s’ajuster au marché. Mais il peut aussi venir
d’un coût de travail trop élevé. En effet, les entreprises
cherchent à ce que leurs salariés leur rapportent autant qu’il
coûte ; ainsi, la demande de travail est plus importante
lorsque le salaire est bas. Il ne faut donc pas que le coût du
travail soit trop élevé. Les néoclassique préconisent donc la
libéralisation du marché, qui doit s’autoréguler. Le chômage
involontaire est dans ce cadre impossible (concurrence pure et
parfaite) : il ne peut résulter que d’une volonté du chômeur
de ne pas occuper une place à un salaire trop bas, qui pourtant est
le salaire d’équilibre.
Les keynésiens
Pour Keynes, le
chômage a des causes macroéconomiques. Les entreprises fixent en
effet le niveau d’emploi en fonction de l’anticipation de la
demande. C’est la demande de travail établie par les entreprises
qui fixe le niveau d’emploi. L’emploi offert est en effet confronté
à la population active, ce qui détermine le niveau de chômage.
C’est donc en fonction des anticipations et de la confiance dans
l’avenir que ce dernier est fixé. Il existe donc selon Keynes un
chômage involontaire, qui peut simplement être enrayé par une
politique expansive favorisant la demande car le chômage vient pour
Keynes de l’insuffisance de celle-ci. La demande étant trop faible,
les entreprises n’embauchent plus. Les salaires doivent donc
diminuer pour que les entreprises embauchent davantage ; mais
les salaires ne doivent pas être trop faibles car la demande se
verrait diminuer, tout comme la consommation. Pour que la demande
reste inchangée, une politique de soutien de la demande est donc
nécessaire (hausse des dépenses budgétaires, baisse des
impôts…).
Nouvelles
théories
Parmi les nouveaux
développements théoriques, on peut citer celui qui évoque les
déqualifications des travailleurs. Après une longue période de
chômage, les travailleurs sont déqualifiés en raison de l’absence
d’influence qu’ils ont eue sur le niveau des salaires. Ces
« outsiders » (en référence au modèle insiders-outsiders) n’ont en effet
pas influencé la formation de l’équilibre sur le marché du travail.
L’employabilité de ces personnes est limitée en raison de ce
passage de chômage, ce qui a une incidence sur le taux de
chômage.
L’application en France
Plusieurs périodes
doivent être évoquées afin de comprendre l’évolution de la
politique de l’emploi en France.
Favoriser le
professionnalisme
La période suivant
le premier choc pétrolier est caractérisée par le développement du
chômage de masse. On considère alors que le chômage vient de
facteurs individuels (insuffisance de formation, chômage de trop
longue durée…). D’importantes actions de formation vont ainsi être
proposées pour résoudre le problème. C’est ainsi que les jeunes
deviendront des acteurs de ce dispositif institué par le
gouvernement de Raymond Barre. Des pactes pour l’emploi des jeunes
(formations et baisse du cout du travail) sont alors établis entre
1977 et 1981. Puis, l’insertion devient une priorité pour des
jeunes qualifiés, non préparés à la vie professionnelle ; les
stages d’initiation à la vie professionnelle sont notamment mis en
place, tout comme les travaux d’utilité collective (stagiaires
affectés à mi-temps dans des organismes à but non lucratif). Aussi,
cette période ouvre la voie à un élargissement des personnes
bénéficiaires de la préretraite.
Alléger le marché du
travail
A la fin des
années 1980, on va considérer que le marché du travail est trop
rigide ; le coût du travail est trop élevé pour les emplois
peu ou pas qualifiés. On remet en cause le SMIC, on supprime
l’autorisation administrative pour les licenciements économiques,
et on allège dans son ensemble le marché du travail. On va d’abord
agir sur le cout du travail, avant de se tourner vers la réduction
du temps de travail.
C’est ainsi qu’en
1989, des mesures d’exonération des cotisations sociales patronales
sont établies pour les entreprises embauchant un premier salarié.
En 1993, le dispositif est élargi pour les salaires inférieurs à
1,2 SMIC, puis inférieurs à 1,33 SMIC, ce qui concerne finalement 5
millions de personnes. Cela permet de stabiliser la part des
emplois non qualifiés dans l’emploi total. Mais ces mesures
présentent un coût non négligeable : 6 milliards d’euros par
an sont dépensés pour ce dispositif.
Après avoir agi
sur les coûts de travail, les choix politiques se tournent vers une
réduction de la durée de travail. On pense alors qu’on se trouve
face à un chômage keynésien, qui ne se résorbe pas, et qui pour
être diminué à long terme, ne peut seulement reposer sur des
allègements de cotisations sociales. Le gouvernement Jospin décide
donc de faire passer la durée légale du travail à 35h, payées 39h.
Cela doit inciter les entreprises à embaucher pour maintenir leur
production. La loi Aubry I de 1998 fixe un calendrier de passage
aux 35h (déterminé à janvier 2000 pour les entreprises de plus de
20 salariés et à 2002 pour les autres). Mais ces dispositifs sont
accompagnés d’autres mesures ; la RTT (réduction du temps de
travail) doit combiner trois éléments pour fonctionner, c’est la
« condition des trois tiers » :
-
Un tiers vient de la modération salariale
-
Un tiers vient des grains de productivité (flexibilité du temps de
travail)
-
Un tiers vient des aides de l’Etat (baisse des charges et
compensation du surcoût salarial par des allègements de cotisations
sociales patronales)
Si la RTT concerne
essentiellement les grandes entreprises, près des deux tiers des
salariés des secteurs associatif et concurrentiel ont une durée
collective de travail de 35 heures en 2003. Une grande partie des
salariés est donc concernée par la mesure. Les travaux de la DARES
montrent que la RTT a permis de créer ou de sauvegarder près de
350 000 emplois.
Assouplir les
mesures
Les mesures mises
en place préalablement vont être conservées, mais elles vont se
voir évoluer.
La loi Fillon de
2003 conserve les 35h mais fait passer le contingent légal annuel
d’heures supplémentaires de 130 à 180. Cela permet de travailler
39h, sans toutefois avoir à recourir au mécanisme de repos
compensateur obligatoire établi par la loi Aubry. Le coût des
heures supplémentaire baisse également.
Plus récemment,
des politiques allant dans le sens de l’insertion professionnelle
ont été mise en place. Ainsi des contrats en alternance, des stages
de formation à l’emploi (pour les chômeurs de longue durée), des
contrats emploi solidarité, des contrats jeunes en entreprise…
Certaines de ces mesures s’avèrent favorable à l’emploi puisque 75%
des jeunes passés par le contrat en alternance trouvent un
emploi.
La trappe à
l’inactivité pose également problème : la reprise d’une
activité ne serait pas assez attractive financièrement car les
minimas sociaux peuvent permettre de vivre mieux qu’en travaillant
(un SMIC à mi-temps par exemple). Les bénéficiaires des minimas
sociaux auraient ainsi choisi de ne pas travailler. Les choix
politiques se sont alors orientés vers un aménagement du passage de
l’inactivité à l’emploi. C’est ce que le Revenu de Solidarité
Active a institué en permettant à ces personnes de cumuler le
salaire avec les aides sociales.