Retrait
Le retrait remet les parties dans l’état où elles se trouvaient
au moment de l’édiction de l’acte : la disparition de l’acte est
rétroactive. Ainsi, les modifications apportées à l’ordonnancement
juridique par l’acte sont remises en cause, l’acte étant censé ne
jamais avoir existé. Ce procédé qui met fin à l’acte permet ainsi à
l’administration de revenir sur une erreur qu’elle a pu commettre
en élaborant un acte.
Retrait des actes non créateurs de droits
Les actes réguliers non créateurs de droit peuvent être retirés
à tout moment, de même que les actes irréguliers non créateurs de
droits. Cette possibilité s’applique aussi bien aux actes
règlementaires qu’aux actes individuels.
Retraits des actes créateurs de droits
Les actes créateurs de droits ont des conséquences sur les
administrés. En conséquence, ils ne peuvent être facilement
retirés. La jurisprudence a donc fixé strictement les conditions de
retrait d’un tel acte.
Le Conseil d’Etat, dans son arrêt Dame Cachet, de 1922, a
établit deux conditions : le retrait de l’acte ne pouvait
intervenir que dans un délai de 2 mois à compter des mesures de
publicité ; les actes faisant l’objet du retrait doivent être
illégaux (un acte légal ne peut être retiré). et qu’il ne pouvait
s’agir que des actes illégaux ; ces deux conditions devaient être
remplies. Il existait donc une concordance entre le délai de
retrait et le délai de recours (de deux mois également).
Lorsque les mesures de publicité n’avaient pas été régulièrement
effectuées, le délai était réputé ne plus courir (CE, 1966, Ville
de Bagneux). Mais cela avait conduit l’administration à prendre des
actes illégaux en omettant volontairement certaines mesures de
publicité ; cela lui permettait de retirer à tout moment les
décisions qu’elle avait prises. L’arrêt Dame de Laubier du Conseil
d’Etat en 1997 met fin à cette situation en refusant le retrait au
delà de deux mois d’un acte dont les formalités de notification
avaient mal été remplies. Cette décision allait bien dans le sens
d’une protection plus importante des droits acquis par les
administrés. C’est dans ce sens que va le Conseil d’Etat dans son
arrêt Ternon de 2001.
L’arrêt Ternon remet en cause la jurisprudence Dame Cachet en
opérant une distinction entre les délais de recours et de retrait.
L’administration dispose en effet désormais de 4 mois à compter de
la signature de l’acte (et non plus de la publicité) pour retirer
un acte illégal. Après ce délai, l’acte même irrégulier ne peut
être retiré. Mais cette décision ne vaut que pour les actes
explicites créateurs de droits. Aussi, elle ne concerne pas les
tiers, qui disposent toujours de 2 mois à compter de la publicité
pour faire une demande (et donc même après les 4 mois si la mesure
de publicité n’est toujours pas intervenue).
Les actes implicites d’acceptation illégaux peuvent être retirés
pendant le délai de recours (2 mois) à compter des mesures de
publicité lorsqu’elles sont nécessaires ou à compter de la date
d’intervention de la décision lorsqu’aucune mesure d’information
n’a été effectuée. C’est ce qu’il ressort de la loi du 12 avril
2000, qui modifiait la solution de la jurisprudence Eve.
Abrogation
L’administration doit évoluer afin de continuellement s’adapter
aux besoins d’intérêt général : c’est le respect du principe de
mutabilité. Pour cette raison des actes devront être abrogés dans
certains cas, afin d’améliorer le service public ou de corriger une
éventuelle illégalité. Cependant, cette mesure peut avoir pour
effet de restreindre des droits acquis par les administrés. Il faut
donc que l’administration modifie sa règlementation tout en
assurant une certaine stabilité aux administrés.
L’administration doit en effet respecter le principe de sécurité
juridique, ce qui rend nécessaire l’éventuelle mise en place de
dispositions transitoires en cas de changement brutal de la
situation juridique. Néanmoins, dans certains cas, l'abrogation est
automatique ; ainsi, les circulaires et instructions signées avant
le 1er mais 2009 sont réputées abrogées si elles ne sont
pas reprises sur le site internet prévu par le décret de 2008.
L’abrogation met fin pour l’avenir aux décisions prises (non
rétroactif).
Abrogation des actes règlementaires
En principe, les administrés nont aucun droit acquis au maintien
d’un règlement. Celui-ci peut donc être abrogé à tout moment par
l’autorité administrative car nul ne peut s’y opposer. Les
administrés ont en revanche droit au maintien des droits qu’ils ont
acquis par l’acte.
L’administration peut être obligée d’abroger des actes
règlementaires. Le principe a été posé par l’arrêt Despujol, du
Conseil d’Etat en 1930, qui établissait cette obligation pour les
seuls actes règlementaires devenus illégaux en raison du changement
de circonstances de droit ou de fait (sous peine d’illégalité. Le
décret du 28 novembre 1983 a élargi l’obligation à tout acte
illégal dès son origine. Le Conseil d’Etat a érigé en principe
général du droit cette obligation, lorsqu’une demande est effectuée
en ce sens, dans son arrêt Alitalia de 1989. Désormais,
l’origine du changement n’importe plus car la demande de
l’intéressé peut se faire à tout moment qu’il s’agisse de
changement des circonstances de faits ou de droit.
La loi du 20 décembre 2007 a également imposé au pouvoir
règlementaire d’abroger les règlements illégaux ou devenus sans
objet soit d’office, soit à la demande d’une personne intéressé. La
loi prévoit l’abrogation d’office, ce qui signifie que
l’administration doit abroger elle-même les dispositions inutiles,
sans attendre la demande d’une personne intéressée. Cela doit
permettre d’obliger l’administration à mettre régulièrement à jour
les textes règlementaires car sa responsabilité pourra se voir
engagée lorsque l’absence d’abrogation aura causé un préjudice.
Abrogation des actes non réglementaires
L’administration n’est pas tenue d’abroger les actes non
réglementaires non créateurs de droit. En revanche, elle y est
obligée dans certains cas :
- Lorsque l’illégalité résulte d’un changement de circonstances
de droit, sans délai
- Lorsque la demande est faite dans un délai de deux mois à
compter de la publication si l'acte est illégal dès l'origine
L’abrogation des actes réglementaires créateurs de droits pose
en revanche plus de difficultés. Dans ce cas, les textes doivent
déterminer les conditions et les cas dans lesquelles cela est
possible. En effet, en principe, ces actes ne peuvent être abrogés.
Mais les actes peuvent être abrogés si un texte le prévoit d’une
part, et si l’abrogation respecte le principe du parallélisme des
formes et des procédures. Ainsi, par exemple, la nomination d’un
fonctionnaire peut être remise en cause par la révocation (par
soumission à la procédure disciplinaire et émission d’un acte
contraire à l’acte de nomination) ou par la mise à la retraite ;
ces deux hypothèses sont en effet prévues par les textes.
Aussi, tout intéressé peut demander l'abrogation d'une décision
illégale non réglementaire lorsqu'elle n'a pas créé de droits (art.
16-1 de la loi du 17 mai 2011).