Socialistes

La première moitié du 19e siècle a ouvert la voie aux premières critiques du système capitaliste. Les socialistes, issus de différents courants, ont en effet montré que l’industrialisation et l’urbanisation croissante conduisent à accroître les problèmes sociaux et à limiter les solidarités interindividuelles.

Socialisme utopique

Les socalistes utopiques ont mis en avant l'importance de l'écart croissant entre riches et pauvres. Alors que certains accumulent des richesses considérables, d'autres vivent dans une misère toujours plus alarmante. C’est donc contre le « paupérisme industriel », misère caractéristique de l’époque, que les socialistes vont se battre.

Parmi les socialistes utopiques, on peut citer Fourrier, Saint-Simon, Proudhon ou Louis Blanc.

  • Fourrier

    Selon Fourier, le commerce a introduit un libéralisme économique qui dégrade l'ensemble de la société en ancrant de manière durable la concurrence et l’égoïsme dans l'esprit humain.

    Pour répondre à cet état de fait, il imagine un monde idéal à partir de l’idée qui consiste selon laquelle l'ordre social repose sur les passions individuelles ; les passions principales, affectives, distributives ou sensitives sont au nombre de douze. Il crée ainsi le système du phalanstère, petits groupes qui se formeraient en fonction des passions dominantes de chacun. L'assemblage complémentaire de ces passions permettrait d’atteindre le bonheur, qui pour Fourrier consiste à avoir « beaucoup de passions, et beaucoup de moyens pour les satisfaire ». L’association des passions se matérialise par la constitution de phalanstères regroupant 1620 individus rassemblant les douze passions. Pour Fourier, cet équilibrage apporterait le bonheur à la société et la liberté de l’homme.

    Économiquement, ces individus regroupés dans les phalanstères échangeraient sans intermédiaires : il existerait un lien direct entre la production et la consommation. Dans un tel contexte, l'Etat ne serait plus d'aucune utilité. Des fédérations d’associations de travailleurs, librement rassemblés, pourraient se substituer à l'Etat.

  • Saint Simon

    Saint-Simon a montré l'importance des travailleurs dans la société. Pour lui, si la France perdait ses meilleurs ouvriers ou ses meilleurs mathématiciens, le mal serait irréparable. En revanche, la perte d’un préfet ne serait pas irréparable car il serait remplaçable ; en effet, il considère qu'il s'agit d'une fonction dans laquelle la personne importe peu, contrairement aux métiers exigeants savoir-faire et maîtrise d'outils.

  • Proudhon

    « La propriété, c’est le vol ! ». Par ces mots, Proudhon évoque son aversion pour la propriété privée et le libéralisme économique. En écartant l'importance du travail collectif, la société capitaliste n'apporte des avantages qu'aux capitalistes qui se fondent sur le travail individuel. Socialiste, Proudhon souhaite créer un socialisme égalitariste ; il refuse donc tout intermédiaire dans les échanges, car ceux-ci accroissent les inégalités en réservant l'accumulation de richesses à une infime partie de la population.

    Proudhon a mis en avant la nocivité de l'Etat en remettant en cause le système politique ; pour lui, la démocratie n'est qu'une illusion. Il propose donc de créer une association fédérative, sur la base d’un pacte. Cette association reposerait sur des règles et valeurs communes, qui se retrouveraient à tous les niveaux de la société (famille, villages, groupes). Proudhon ne cherche pourtant pas la destruction de l’Etat. Il souhaite le rendre fédéraliste et décentralisé pour qu'il représente le pluralisme de la société.

  • Louis Blanc

    Louis Blanc élabore un schéma d’amélioration de la condition ouvrière dans L’Organisation du travail. Pour concrétiser ses idées, il a créé les Ateliers sociaux, et politise ainsi le mouvement socialiste. Ces Ateliers permettaient aux travailleurs de bénéficier du même salaire, et de fonder un grand secteur économique sous la responsabilité de l’Etat. Après des débuts convaincants, le concept des Ateliers ne sera pas élargi, notamment car le projet fait l'objet de pressions de la part des républicains modérés.

Socialisme marxiste

« Dans la production sociale des moyens d’existence les hommes contractent des rapports déterminés, nécessaires et indépendants de leur volonté, des rapports de production qui sont corrélatifs à un stade déterminé du développement de leurs forces productives » (Karl Marx, Critique de l’économie positive).

Karl Marx, économiste qui a profondément marqué la pensée économique et sociale du XXe siècle, avait pour principal objectif de dénoncer les méthodes capitalistes. Il a également développé de nombreuses théories philosophiques, qui ne sont pas l’objet d’étude ici.

Une société de classes

Dans son Manifeste du Parti Communiste, Marx montre que l’Histoire a toujours été fondée sur la lutte des classes. La société est en effet formée de plusieurs classes sociales, qui se confrontent en raison de leurs différences. Pour Marx, les sociétés humaines évoluent sous l'impulsion d'un conflit perpétuel entre les classes sociales aux intérêts antagonistes :

  • Dans la société féodale, la classe militaire des chevaliers luttait contre la classe des paysans
  • La révolution française a donné le pouvoir à la bourgeoise en 1789, qui a pris le pouvoir sur la masse productive
  • Enfin, la classe ouvrière (le prolétariat) est devenue la classe dominée après la révolution industrielle. Cette lutte de classes, conduirait, pour Marx à la disparition du capitalisme et avec elle à l’extinction de la classe bourgeoise comme classe dominante. Les prolétaires atteindront ainsi le pouvoir à l'issue de cette lutte des classes

Marx montre ainsi que la société, en tant qu’objet, est en perpétuel mouvement. Les divergences entres les classes de la populations conduisent à des volontés de changements, qui se concrétisent par des luttes constantes. La société est donc dynamique : les divergences provoquent des états de faits ponctuels qui évoluent rapidement vers de nouveaux états de fait, en fonction des luttes. L'Histoire repose donc sur une formation sociale historique. Marx trouve ainsi la source de la réalité sociale dans l’Histoire ; néanmoins sa conception diffère de la théorie hégélienne selon laquelle l’évolution des idées entraîne l'évolution de la société ; pour Marx, ce sont les conditions matérielles d’existence qui déterminent la réalité sociale. Cette dernière se caractérise par des modes de production qui varient avec le temps.

Dénonciation du système capitaliste

L’avènement de la société industrielle a mis en avant les difficultés de la classe ouvrière. En réaction contre cette réalité, Marx prônait la dissolution du mode de production capitaliste. Il considérait en effet que le mode de production capitaliste repose sur l’achat d'une force de travail. Les ouvriers vendent leur force de travail en échange d’un salaire ; les entrepreneurs revendent quant à eux les produits à un prix qui est fonction de leur valeur d’échange (en fonction des prix du marché). En vendant ces produits, les capitalistes récupèrent une plus-value. Marx dénonce cette exploitation du travailleur, « l’exploitation de l’homme par l’homme ».

Considéré comme le dernier classique, Marx leur adresse une critique. Il montre que la division du travail, défendue par Adam Smith, contribue à la domination du capital sur les forces de travail. Par la volonté d’accumulation du capital, les machines vont se substituer à l’homme, et le capital se substituer au travail.