Liberté de la preuve
Le principe de la liberté de la preuve est visé à l'article 427
al.1 du Code de procédure pénale : "les infractions peuvent être
établies par tout mode de preuve". Ce principe doit permettre une
meilleure efficacité destinée à aiguiller l'intime
conviction du juge. Ce dernier dispose d'un pouvoir souverain
lui permettant de se forger une opinion sur la base des éléments de
preuve fournis ; il doit motiver ses jugements (ce qui est admis en
matière criminelle depuis la loi du 10 août 2011).
Les preuves peuvent donc être variées : indices, aveu,
témoignages, etc. Ces modes de preuve ont la même valeur, aucune
n'est supérieure aux autres ; en pratique, certaines preuves
peuvent avoir plus de valeur que d'autres.
Indices
Tous les éléments matériels tels que les traces ou empreintes
peuvent constituer des preuves, de même que les éléments
directement attachés aux individus (comportement de la personne,
etc.). Les preuves scientifiques sont en pratique plus
convaincantes ; ainsi, les prélèvements sur le corps sont parfois
obligatoires (le refus de se soumettre à des tests dans fait
encourir certains cas une peine d'emprisonnement et une peine
d'amende : c'est le cas des infractions sexuelles), car le droit à
l'intégrité physique n'est pas une principe à valeur
constitutionnelle.
Les expertises utilisent ces indices pour les faire analyser par
des spécialistes lorsque leur interprétation est nécessaire.
L'expert est désigné par le juge : il peut l'effectuer d'office ou
à la demande du ministère public ou des parties privées. L'expert
désigné devra prêter serment d'apporter son concours à la justice
et agir en lien avec le juge. Il remettra un rapport contenant ses
conclusions, ce qui permettra de demander une contre-expertise.
Témoignage
Le témoignage permet de rapporter des faits dont des témoins ont
connaissance. Elles les rapportent durant l'enquête, l'instruction
ou le jugement. A partir du stade de l'instruction, le témoin doit
prêter serment.
Toute personne ne peut pas témoigner. Certaines incompatibilités
empêchent les personnes jugées trop proches de l'affaire de
témoigner, pour des raisons de partialité (juges, greffiers, etc.).
Il existe également des incapacités : les mineurs de moins de seize
ans sont seulement entendus sans prestation de serment, et les
personnes privées de droits civiques, civils et de famille peuvent
les empêcher de témoigner. Dans certains cas au contraire, les
témoins sont obligés de révéler les faits dont ils ont
connaissance. Ils sont tenus de révéler les faits, de dénoncer
certaines infractions ou de déposer.
Pour protéger certains témoins, il est possible que le témoin
dépose de façon anonyme. Néanmoins, aucune condamnation ne peut
être prononcée sur le seul fondement de ce témoignage.
Aveu
L'aveu a longtemps été considéré comme "la reine des preuves".
Il est désormais un mode de preuve comme un autre, ce qui évite que
les déclarations aient une importance excessive ; certaines
personnes avouent puis se rétractent, d'autres avouent des faits
alors qu'elles sont innocentes. Le juge peut ainsi écarter les
éléments de la déclaration qu'il considère douteux. Il apprécie le
caractère de l'aveu judiciaire (fait en justice) ou
extra-judiciaire (connu indirectement par les juges).
Légalité de la preuve
Les preuves doivent être légalement recueillies. Elles doivent
être fiables et ne pas avoir été obtenues en portant atteinte aux
libertés de la personnes (dignité de la personne, principe du
contradictoire). Aussi, le principe de la légalité de la preuve
repose sur le concept de loyauté : les preuves ne doivent pas être
obtenues par la ruse, ou par des manoeuvres.
Néanmoins, certaines pratiques sont autorisés :
vidéosurveillance, écoutes téléphoniques, etc. Elles ne sont
légales que si elles respectent des règles spécifiques, mises en
place progressivement. Avant 1991, aucun texte ne garantissait la
tenue des écoutes téléphoniques ; après avoir été condamnée par la
CEDH (arrêt Kruslin et Huvig de 1990), la loi a réglementé
la pratique en 1991. De même, la provocation n'est pas considérée
comme un stratagème illicite lorsqu'elle respecte le droit : la
provocation à la preuve est autorisée (infiltration possible), mais
la provocation à l'infraction est interdite (la police ne peut pas
inciter à la commission d'une infraction). Ainsi, les policiers
peuvent légalement s’infiltrer sous le contrôle du juge
d'instruction et du procureur durant quatre mois maximum (le
renouvellement est possible) ; elle peut également consister en une
infiltration électronique (recueil, prise de contact par le biais
des outils informatiques).
Néanmoins, les preuves recueillies de manière illégale peuvent
être recevables. Cela est accepté tant par les juridictions
nationales que par le droit conventionnel (arrêt Schenk de
la CEDH de 1988).
Le procès-verbal
Certaines infractions ne peuvent être démontrées que par
procès-verbaux. Les procès-verbaux font foi tant que la preuve
contraire n'est pas établie : "la preuve contraire ne peut être
rapportée que par écrit ou par témoins". Mais la preuve contraire
est difficile à obtenir, notamment car un seul témoignage ne suffit
pas. Aussi, certains procès-verbaux valent jusqu'à inscription de
faux (cela n'existe que dans de rares cas, notamment dans le cas
des procès-verbaux dressés par les agents des douanes).