Mise à jour : February 2017

enrichissement injustifié

Notion jurisprudentielle puis codifiée en 2016 (art. 1303), l’enrichissement injustifié permet de sanctionner l’enrichissement injuste d’une personne obtenu au détriment d'une autre.

Fiche : Quasi-contrats
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La jurisprudence reconnaissait ainsi déjà le principe de in rem verso (action en restitution de la chose, ou venant d'une volonté d'équité, contester l'enrichissement au détriment d'autrui). En effet, l’enrichissement sans cause est apparu pour la première fois en 1892, dans l’arrêt Boudier contre Patureau. En l'espèce, il s’agissait d’un fermier ayant fructifié un terrain ne lui appartenant pas (il disposait seulement d’un contrat de bail). Le propriétaire avait alors obtenu la résiliation du contrat de bail, et avait ainsi pu récupérer ses terres, fructifiées par les engrais achetés par le fermier à un marchand. Le propriétaire s’était donc enrichi au préjudice du marchand. Une indemnisation pouvait donc être demandée par le marchand.

Conditions

L'enrichissement injustifié a lieu au détriment d'autrui.

Enrichissement et appauvrissement corrélatifs

Dès lors que le patrimoine d’un individu augmente sans contrepartie (sans aucune perte de son coté, perte financière ou non), on considère qu’il y a enrichissement. L’enrichissent peut consister en une acquisition matérielle ou morale ; il peut provenir de diverses situations, et notamment d’un profit engendré par le non paiement d’un service.

Afin que l’enrichissement sans cause soit avéré, l’individu appauvri ne doit pas avoir tiré d’intérêt à son appauvrissement.

L’appauvrissement consiste en la diminution du patrimoine de l’intéressé. Il peut aussi bien s'agir d’une dépense qui n'engendre aucun profit que de la perte d'un objet.

Une fois l’appauvrissement et l’enrichissement séparément constaté, il faut vérifier qu’il existe un lien entre les deux. L'enrichissement doit en effet être la cause de l'appauvrissement, sa conséquence déterminante (mais pas nécessairement directe en vertu de l’arrêt Boudier), et l’individu enrichi doit avoir tiré un avantage de cette situation.

Lorsque l'affaire met en jeu un tiers, le lien entre l’appauvrissement et l’enrichissement est plus difficile à déterminer. Dans l’affaire Boudier, le marchand d’engrais est un tiers, le fermier étant l'intermédiaire entre le marchand et le propriétaire ; il devait donc être indemnisé par le propriétaire, puisqu’il s’agit de la personne qui s’est enrichie.

Un enrichissement injustifié

L'enrichissement est considéré injustifié lorsqu'il ne résulte pas de l'exécution d'une obligation par l'appauvri, ni de sa volonté.

Ainsi, si , l'appauvri a commis une faute conduisant à son appauvrissement ou lorsque l'appauvri a volontairement effectué un acte conduisant à son appauvrissement, il ne peut légitimement demander une indemnisation. Si en revanche l'imprudence ou la négligence sont à l’origine de l’enrichissement, l'action peut être engagée.

En revanche, le juge peut modérer l'indemnisation lorsque l'appauvrissement résulte d'une faute de l'appauvri.

Principe de subsidiarité

Lorsque l'appauvri peut tenter une autre action que sur le fondement de l'enrichissement injustifié, cette dernière lui sera refusée.

En effet, elle « ne doit être admise que dans les cas où le patrimoine d’un personne se trouvant, sans cause légitime, enrichi au détriment de celui d'une autre personne, celle-ci ne jouira, pour obtenir ce qui lui est dû, d'aucune action naissant d'un contrat, d'un quasi-contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit » (Civ., 2 mars 1915, Grands arrêts, vol. 2, n°228).

De la même façon, l'action sur ce fondement ne peut être menée si elle "se heurte à un obstacle de droit" (ex: prescription).

Effets

L'action menée sur le fondement de l'enrichissement injustifié permettra d’indemniser l’appauvri.

Le montant de l’indemnisation n’est pas totalement librement fixé par le juge. Ce dernier doit en effet prendre en compte le montant de l’appauvrissement et celui de l’enrichissement, et ne retenir que le plus faible des deux montants, qui deviendra le montant de l’indemnisation. Ainsi, l'enrichi ne pourra jamais verser une indemnité supérieure au montant de l'appauvrissement, mais seulement une somme égale à celui-ci au maximum. En revanche, lorsque l'enrichi est de mauvaise foi, l'indemnité est égale au montant le plus important des deux valeurs.

Le montant de l’appauvrissement comme celui de l’enrichissement sont appréciés au jour du jugement.