Du rôle secondaire à une autorité restaurée
En 1848, la première élection du chef de l’Etat au suffrage
universel portait Louis Napoléon Bonaparte au pouvoir. Premier
président de la République, il était élu pour 4 ans et bénéficiait
d’importants pouvoirs. Mais le régime est bouleversé en 1851,
lorsqu’il décide de fomenter un coup d’Etat pour diriger un
Empire.
Et après des années de règne, la figure du président de la
République était écornée. Ainsi, lorsqu’il a été décidé de la
rétablir en 1875, la figure du président se rapprochait davantage
de celle d’un monarque : le président de la République bénéficiait
d’importants pouvoirs (chef des armées, président du Conseil des
ministres, responsable du pouvoir réglementaire, etc.). Mais ce
système, qui donne au président de la République de larges
pouvoirs, ne fonctionnera pas.
Suite à ces échecs, une nouvelle façon d’exercer la présidence
de la République est apparue : le président de la République
jouerait désormais un rôle secondaire. C’est ainsi que le président
de la République a joué un rôle minime dans la vie politique sous
la 3e République.
Et après la Seconde Guerre mondiale, la 4e République
offrait au président de la République des pouvoirs restreints,
essentiellement protocolaires. Tout va cependant changer avec la
Constitution de 1958, par laquelle le général de Gaulle a souhaité
donner de larges pouvoirs au chef de l’Etat pour assurer l’autorité
de l’Etat.
Le pouvoir du chef de l’Etat
Pouvoir dans la durée
En 1958, lorsque le général de Gaulle revient au pouvoir, il
réclame un véritable changement : le président de la République
doit devenir la « clé de voute du régime », selon l’expression de
Michel Debré.
Le septennat devient donc important pour donner au président de
la République les moyens d’inscrire les orientations de l’Etat dans
la durée.
La conception du général de Gaulle distingue le pouvoir d’Etat
(pouvoir d’assurer l’autorité et la continuité de l’Etat) du
pouvoir parlementaire (pouvoir de gérer le pays au quotidien, qui
appartient au gouvernement et au Parlement). Pour le général de
Gaulle, le pouvoir d’Etat rend indispensable un travail sur le long
terme.
Aux côtés du président de la République, les ministres assurant
les pouvoirs régaliens de l’Etat doivent, eux aussi, rester dans
leurs fonctions durant un temps relativement long. Ainsi du
ministre des Affaires étrangères ou du ministre de l’Intérieur.
La réforme de 2000 a cependant instauré le quinquennat.
Pouvoir de gestion des crises
Le président de la République doit également bénéficier de
larges pouvoirs destinés à faire face aux graves crises
susceptibles de survenir durant son mandat. L’article 16 de la
Constitution prévoit ainsi que le président de la République
bénéficie des pleins pouvoirs en cas de crise, après avoir demandé
l’avis des présidents d’assemblées et du Premier ministre pour y
recourir.
Le président de la République peut également résoudre les crises
en provoquant une dissolution de l’assemblée avant de lancer des
élections anticipées.
Pouvoir diplomatique et militaire<.h3>
Pour assurer la continuité de l’Etat, le président de la
République est également chef des armées (il lui appartient en
effet de recourir à l’arme nucléaire, mais aussi de présider les
conseils de défense) et responsable de la diplomatie (il signe les
traités, dirige l’action diplomatique et représente la France dans
les grands sommets internationaux tels que le G20).
Pouvoir de gérer la vie quotidienne du pays
Le président de la République gère, avec le Premier ministre et
le gouvernement, la vie quotidienne de la France en présidant le
Conseil des ministres, qui joue un rôle important dans la vie
politique.
Le rôle du président de la République s’exerce notamment par sa
faculté de fixer l’ordre du jour en Conseil des ministres, en
accord avec le Premier ministre (ce qui peut poser problème au
président en période de cohabitation).
De plus, le président signe les décrets délibérés en Conseil des
ministres, les ordonnances mais aussi les principales nominations
(membres du Conseil d’Etat, ambassadeurs, des grandes entreprises
publiques, etc.) qui ont lieu en Conseil des ministres.
Depuis 2008 en revanche, le Parlement ne doit pas s’opposer à
une nomination (avis contraire à la majorité des 3/5e des
commissions compétentes) pour qu’elle puisse avoir lieu ;
néanmoins, l’avis du Parlement n’est requis que pour les
personnalités travaillant les instances économiques ou relatives
aux libertés fondamentales.
L’évolution du statut de chef de l’Etat
Limitation des périodes de cohabitation
Plusieurs fois, le président de la République s’est soumis à une
cohabitation après des élections législatives : il a ainsi été
contraint de composer avec un gouvernement qui ne relevait pas de
sa tendance politique. Malgré ces périodes de cohabitation, la
figure du président de la République ne s’est pas affaiblie. Aucun
des Premiers ministres n’a en effet remis en cause les pouvoirs du
chef de l’Etat.
Aujourd’hui, le président de la République a conservé ses
pouvoirs en matière diplomatique, en matière de gestion des crises,
etc.
Depuis que le mandat présidentiel a été abaissé à 5 ans et que
l’élection des députés a été alignée sur l’élection du président de
la République, il n’y a plus eu de période de cohabitation. Le
risque d’affaiblissement du pouvoir présidentiel est par conséquent
amenuisé. De plus, les députés étant majoritairement issus du même
parti politique, le chef de l’Etat est davantage le chef de la
majorité parlementaire.
La responsabilité du chef de l'Etat
Le chef de l'Etat bénéficie, selon l'article 67 de la
Constitution, d'une immunité impliquant qu'il « n'est pas
responsable des actes accomplis en cette qualité » et qu'il ne peut
pas être traduit en justice pendant son mandat.
Pour contrebalancer ce statut pénal particulier, l'article 68
prévoit depuis la révision constitutionnelle de 2007 que le chef de
l'Etat peut être destitué « en cas de manquement à ses devoirs
manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat ». La
procédure de destitution repose sur 5 étapes : proposition d'une
résolution par les parlementaires, vérification de la conformité de
la proposition, examen de la proposition par les Assemblées,
réunion de la Haute Cour puis comparution du président devant
celle-ci.
Pour aller plus loin : l’affaiblissement des pouvoirs du chef
de l’Etat
La France a progressivement transféré une partie de ses
compétences à l’Union européenne. De plus, le pays ne bénéficie
plus d’une grande puissance militaire et économique qui lui
permettaient de peser sur la scène internationale. Ainsi, le rôle
du chef de l’Etat s’exerce davantage au niveau européen ; il lui
revient en effet d’y mener la politique européenne de la
France.