Le phénomène de l’auto consommation dans les sociétés
primitives
Il y a environ 11 000 ans, un important changement climatique a
conduit à la sédentarisation des premiers humains. La cueillette,
la chasse et la pêche ont progressivement été remplacées par
l’agriculture (de là est née la propriété privée). Puis c’est
l’écriture et l’invention de la roue qui viendront ensuite.
L’innovation a donc permis la survie des hommes dans un climat
pourtant défavorable.
Mais à une époque où le groupe constitue la base des relations
sociales, on ne produit que pour assurer la survie du groupe. On ne
produit pas pour vendre, simplement pour vivre. Les échanges sont
donc basiques, et dans ce cadre particulier, la monnaie n’a aucune
raison d’être. On n’épargne pas, on ne capitalise pas. L’échange se
fait par le troc, qui est alors le meilleur moyen pour obtenir un
bien. Mais cette technique va rapidement connaître ses
limites : il est difficile de trouver une personne qui aurait
à la fois le bien que l'on désire et qui voudrait ce lui qui nous
appartient. La monnaie fait alors son apparition pour remplacer le
troc et améliorer les conditions des échanges : le commerce
émerge.
Du Moyen Age à la révolution industrielle
Dans la société très chrétienne du Moyen-âge, l’économie occupe
une place bien secondaire. Le système féodal fondé sur l’autarcie
favorise plutôt le respect des maires que des entrepreneurs.
Pourtant, l’évolution des moyens techniques va faire évoluer les
mentalités. Progressivement, on ne produira plus pour sa propre
consommation, mais pour celle des autres : on produira
désormais pour vendre.
L’importance des découvertes
Les prémices du capitalisme se renforcent avec la découverte du
Nouveau Monde par les grands navigateurs (Magellan, Christophe
Colomb…). La découverte de nouveaux continents va entraîner
d’importants afflux d’or, essentiellement, au départ, des Amériques
vers l’Europe. Les flux de métaux précieux s’accroissent ainsi
progressivement, et avec eux, l’idée d’une domination de l’homme
sur la Terre ; les hommes maîtrisent en effet la Terre en
l'exploitant. Les idées évoluent sous l'influence de ces échanges,
et sont diffusées grâce au développement de l’imprimerie.
Mais les diffusions des innovations restent limitées. Le manque
de communication entre les régions entraîne d’importantes
inégalités entres-elles ; certains instruments agricoles ne sont
utilisés que dans quelques régions. L’époque n’est donc pas à la
révolution agricole, bien que la plupart des outils qui la
propulseront sont déjà connus à l’époque (mais non diffusés).
Pourtant, progressivement, on assiste à un désenclavement
économique.
L’industrie naissante
Le système féodal va progressivement s’affaiblir tandis que les
échanges marchands et la circulation monétaire vont largement se
développer. Le billet de banque, apparu dès le XVIIe
siècle, favorise ces échanges. En permettant les crédits, le billet
augmente la création de monnaie.
Dans ce climat, les mentalités évoluent, et on assiste à
l’augmentation du nombre de commerçants, qui se regroupent et
accroissent rapidement leurs fortunes. L’industrie va également se
développer au même moment ; les industries au savoir-faire
spécifique (tapisserie de luxe, verrerie…) se consolident tandis
que les petites industries fournissent localement leurs clients
(pour les biens ordinaires). Il existe donc à cette époque une
industrie rurale qui permet à la population paysanne de vivre, et
qui entretient des liens étroits avec les villes car les grands
marchands y commandent également leurs produits (les industries ont
besoin des ressources locales en matières premières). C’est ce
qu’on appelle la proto industrie.
Cette effervescence permet une importante accumulation de
capitaux par les marchands des villes , mais aussi par les paysans
lorsqu’ils sont propriétaires fonciers.
Le développement des industries (surtout des industries
textiles, qui génèrent d’importants flux de marchandises) a pour
effet d'accroître le salariat. Les pays nouvellement industrialisés
entrent alors dans une ère où les travailleurs perçoivent des
salaires en échange de la production de produits commercialisés par
le marchand.
Une difficile stabilisation
Les prix augmentent considérablement au cours des
XVIe et XVIIIe siècles. Ces phénomènes
inflationnistes résultent de l’accroissement de la masse monétaire
engendrée par les arrivées de métaux précieux (provenues d’Amérique
essentiellement). On a pu constater que le prix des grains
fluctuait sur des cycles de 6 à 10 ans ; on peut les comparer
à des cycles Juglar. Ernest Labrousse au travers se son analyse
montre que ces cycles représentent le temps nécessaires pour
compenser les mauvaises récoltes. La population est en effet encore
très dépendante des conditions climatiques, qui lorsqu’elles sont
mauvaises entraînent des catastrophes sanitaires.
Les prix sont donc très variables en raison du temps. On alterne
sans cesse années d’abondance et années de pénurie. Les prix
peuvent donc s’envoler d'une année sur l'autre. Et puisque la
demande ne s’ajuste pas à l’offre (car elle est constante), qui est
seulement fonction de la récolte, on assiste à des crises dites
d’ « ancien régime ». Régulièrement, la France
connaît de grandes famines ; la plus grave est celles des années
1692-1693, qui conduit à la mort d’un million de personnes (la
France compte 22 millions d’habitants).
L’importance de l’Etat
Alors que l’Etat n’intervenait que très peu dans l’économie, son
rôle a évolué sous l'influence de la pensée mercantiliste. Les
Etats modernes ont en effet de nouveaux besoins : comme les hommes
sont devenus sédentaires, l'Etat peut imposer des charges à son
peuple. Pour concrétiser cette vision de la société, la doctrine
mercantiliste encourage l’Etat à instaurer des tarifs douaniers
plus importants. Le but de l'Etat est en effet d'accroître sa
richesse en augmentant son stock de métaux précieux ; la
balance commerciale doit être excédentaire, et les importations
limitées. C’est donc pour renforcer ce protectionnisme que l’Etat
doit intervenir. Cette politique, le colbertisme, sera appliquée en
France dans les années 1660.
Mais le rôle de l’Etat dans l'économie va être remis en cause
par une théorie nouvelle : la physiocratie. Selon les
physiocrates, la richesse d'un Etat ne se mesure pas en fonction de
l'accumulation des métaux précieux, mais de la production
matérielle. Ainsi, ils considèrent qu'au sein de la société, seuls
les agriculteurs créent de la richesse, qui est transformée ensuite
pour être vendue. Il revient donc à ceux qui produisent cette
richesse de se développer ; pour cela, il faut que l'Etat
intervienne le moins possible dans le circuit de production. L'Etat
doit en effet laisser faire les individus car il agissent dans leur
propre intérêt, et donc dans celui du pays. En France, on tente
d'appliquer cette théorie : la déclaration du contrôleur général
Bertin de 1763 autorise la concurrence libre et entière du commerce
des grains, à laquelle la population est vivement opposée.
L'opposition est si forte que les anciennes pratiques seront
finalement remises en application. Turgot fait pourtant une autre
tentative : il autorise à nouveau la libre circulation des
blés dans le royaume, puis du vin. Mais cet essai s'avère peu
concluant car le peuple refuse cette politique ; il est davantage
préoccupé par les mauvaises récoltes. Ainsi, lorsque le jeune roi,
Louis XVI, arrivera au pouvoir, il reviendra à la politique
précédente après avoir disgracié Turgot.