Le juge d'instruction décide des actes d’instruction à mener ;
néanmoins, le ministère public ainsi que les parties peuvent
également demander l’exécution de certains actes (selon la loi du
15 juin 2000). Aussi, le procureur de la République peut demander
au juge d’instruction d'effectuer certains actes.
Mise en examen et témoin assisté
La mise en examen n'est possible qu'en cas "d'indices graves ou
concordants" qui permettent de croire en l'implication de
l'intéressé aux faits examinés. Avant sa mise en examen,
l'intéressé apporte ses observations lors de l'interrogatoire de
première comparution. Il n'est mis en examen que si la procédure de
témoin assisté ne peut être mise en œuvre.
La mise en examen doit respecter certaines règles. Tout d'abord,
elle doit être filmée en matière criminelle, tout comme
l'interrogatoire de première comparution. Aussi, le mis en examen
peut demander à ce que soient effectués certaines expertises,
confrontations, peut demander à être interrogé, etc. S'il n'a pas
été entendu depuis 4 mois, il peut faire une demande écrite au juge
pour être entendu.
Interrogatoire de première comparution
Les intéressés sont convoqués par lettre recommandée ou
notification par officier de police judiciaire ; ils sont alors
informés de la date et de l'heure de la convocation, des faits et
de leur qualification juridique. Les intéressés seront convoqués
dans un délai compris entre 10 jours et deux mois.
Lors de la première comparution, le juge d'instruction informe
la personne des faits et de leur qualification juridique, de sa
possibilité de choisir un avocat (ou désignation d'office) ; le
refus de l'aide d'un avocat n'est pas définitif. Le juge informe
également la personne de ses possibilités d'action lors de
l'interrogatoire : possibilité de faire des déclarations, de se
taire ou d'être interrogée.
A la fin de l'interrogatoire, le juge doit informer la personne
mise en examen de son droit de faire une demande d'acte ou de
présenter un requête en annulation.
L'interrogatoire aboutit à la mise en examen ou à la procédure
de témoin assisté. Dans certaines conditions, la personne mise en
examen peut demander au juge de revenir sur sa décision et de lui
octroyer le statut de témoin assisté (loi du 5 mars 2007). Si la
mise en examen est annulée, la personne devient témoin assisté.
Interrogatoires ultérieurs
Ces interrogatoires doivent avoir lieu en présence des avocats
des intéressés ; la convocation doit avoir lieu au plus tard cinq
jours ouvrables avant l'interrogatoire. Les pièces du dossier
doivent être mises à leur disposition au plus tard quatre jours
ouvrables avant l'interrogatoire. Le procureur de la République
peut assister à tous les interrogatoires, mais il revient au juge
d'instruction de les diriger. Les avocats ainsi que le procureur de
la République peuvent présenter leurs observations et poser des
questions (le mis en examen pose ses questions par l'intermédiaire
de l'avocat).
Témoin assisté
Le statut du témoin assisté vise plusieurs personnes :
- personnes visées par un réquisitoire introductif ou supplétif,
et non mis en examen
- personne visée par une plainte ou mise en cause par la victime
ou par un témoin (et contre laquelle il existe des indices rendant
vraisemblable sa participation à l'infraction)
Le juge d'instruction peut informer l'intéressé par lettre
recommandée de sa qualité de témoin assisté. Durant la première
audition, il constatera son identité et lui fera part du
réquisitoire introductif ou de la plainte. Le juge d'instruction
devra l'informer de ses droits. L'intéressé pourra être assisté par
un avocat qui a accès au dossier, et pourra demander une
confrontation ; il peut également demander un complément
d'expertise ou une contre-expertise, ainsi que des demandes en
nullité (délai d'un ou trois moins à compter de l'envoi de l'avis
de fin d'information).
Le procureur de la République peut assister aux interrogatoires
ainsi qu'aux confrontations et auditions du témoins assisté.
Le témoin assisté peut demander à tout moment de la procédure
d'être mis en examen (en cas d'indices graves ou concordants). Il
ne peut être placé en détention provisoire, ni être assigné à
résidence, renvoyé devant une juridiction de jugement ou placé sous
contrôle judiciaire.
Audition
La personne auditionnée reçoit une convocation par lettre
recommandée avec accusé de réception, ou est citée par huissier ou
agent de la force publique. La comparution est obligatoire (à
défaut, la personne est contrainte à verser une amende de 3750 €
(art. 434-15-1 du CP) si elle n'a pas d’excuse valable). Tout
témoin peut également comparaître volontairement. Tout refus est
mentionné au procès-verbal.
La personne prête serment dans la majorité des cas ; les mineurs
de moins de seize n’y sont pas contraints. On peut rappeler que les
journalistes doivent déposer, mais n'ont pas à révéler leur source
d’information.
On distingue les auditions de la partie civile des auditions des
témoins simples.
Audition des parties civiles
Le juge d'instruction a l'obligation d'informer les victimes de
l'ouverture de la procédure et de leur droit de se constituer
partie civile.
Les mineurs victimes de certaines infractions (agressions
sexuelles, etc.) doiven tobligatoirement être assistées d'un
avocat, conformément à l'art. 706-51-1 du Code de procédure
pénale.
Audition des témoins simples
Le juge d'instruction peut auditionner les personnes dont
l'audition peut être utile. Ces personnes sont tenues de
comparaître et de déposer ; si elles ne comparaissent pas ou
refusent la comparution, elles peuvent y être contraintes par la
force publique.
Les témoins ne seront pas assistés d’un avocat et doivent prêter
serment (sauf enfants de moins de 16 ans). Ils sont entendus
séparément et sans les parties. Un procès-verbal de l'audition est
dressé et signé par le témoin (après relecture), le juge et le
greffier. Le procureur de la République peut assister aux
auditions.
Perquisitions et saisies
Les perquisitions peuvent être menées par le juge ou par un
officier de police judiciaire (muni d'une commission rogatoire).
Ces deux autorités compétentes disposent des mêmes possibilités en
matière de perquisition que lors de l'enquête de flagrance ; elles
peuvent donc agir en tout lieu du territoire sur lequel des indices
peuvent se trouver. Le greffier doit les accompagner, et plus
rarement, le procureur de la République.
Lorsque la perquisition a lieu au domicile de la personne mise
en examen, celle-ci doit être à son domicile au moment de la
perquisition ; son assentiment n’est pas nécessaire. La
perquisition doit être effectuée en journée (entre 6 et 21 heures),
mais dans certains cas, il est possible qu’elle ait lieu de nuit
(pour les personnes punies d’au moins 10 ans d’emprisonnement ayant
commis des actes de terrorisme, en cas d'urgence, lorsque les
preuves peuvent rapidement disparaitre, ou encore lorsqu’il s’agit
d’un crime flagrant).
Les objets saisis lors de la perquisition sont placés sous
scellée. Depuis la loi du 21 juin 2004, les données informatiques
peuvent également être saisies. L’ouverture des scellées ne peut
être effectuée qu’en présence de la personne mise en examen,
accompagnée de son avocat, et du tiers chez qui la perquisition a
eu lieu. Il revient au juge d’instruction de décider de la
restitution des objets en question.
Écoutes téléphoniques
Cette pratique pourtant courante n'a pendant longtemps été
soumise à aucune réglementation. Le législateur en précise
désormais les modalités par la loi du 10 juillet 1991 (loi n°
96-646), édictée après la condamnation de la France par la Cour
européenne des droits de l’homme (arrêt Kruslin et Huving du 24
avril 1990).
Le juge d’instruction peut décider de mettre en œuvre des
écoutes téléphoniques dans le cas des crimes et des délits (lorsque
la peine encourue est supérieure à deux ans d’emprisonnement et
lorsque les nécessités de l'information l'exigent) ; il peut «
prescrire l’interception, l’enregistrement et la transcription de
correspondances émises par la voie des télécommunications » (art.
100 du CPP). La décision du juge n’est susceptible d’aucun recours,
et l’officier de police judiciaire a l'obligation de s'exécuter. On
peut ajouter que la loi du 9 mars 2004 interdit l’interception des
communications téléphoniques entre un avocat et son client (sauf si
des indices rendent l’avocat suspect) ; aussi, les parlementaires
bénéficient également d'une protection.
L’écoute téléphonique n'est autorisée qu'en cas de réelle
nécessité d’information. Elles ciblent toutes les personnes qui
pourraient détenir des renseignements importants pour l'enquête.
L'écoute s'effectue par divers moyens de communications (téléphone,
fax, mail). Chaque opération d’interception fait l'objet d'un
procès-verbal qui mentionne les dates et heures des informations
recueillies (conformément à l’article 100-4). Les enregistrements,
placés sous scellé, sont conservés jusqu’à la date de prescription,
avant d'être détruits à cette date sur l’initiative du procureur de
la République.
Lorsque les écoutes sont interceptées sur la ligne d’un tiers,
les personnes concernées peuvent invoquer la nullité (selon la Cour
européenne des droits de l’homme).
Expertises
L’expertise est une opération qui consiste à attribuer à un
professionnel la charge d’interpréter des données techniques afin
de rechercher des preuves (art. 156, 158) : il peut s’agir de
déterminer la nature d'une substance afin de voir s’il s’agit d’un
poison, d’un groupe sanguin (Crim. 4 nov. 1987, D. 1988, somm.
192), etc.
Le juge d’instruction peut demander à ce qu'une expertise soit
effectuée, tout comme le ministère public ou les parties ;
néanmoins, la décision de la mettre en œuvre revient toujours au
juge d’instruction (une simple ordonnance pourra permettre à ce
dernier de s’opposer à une expertise).
La Cour d’appel (liste régionale) et la Cour de cassation (liste
nationale) fournissent une liste d’experts parmi lesquels le juge
d’instruction en choisit un, ou plusieurs. L’expert effectue sa
mission sous serment, et sous contrôle du juge d’instruction ou
d’un magistrat désigné. L’expertise se déroule selon un délai
déterminé, qui peut être prorogé (art. 161).
Un rapport d’expertise est remis au juge d’instruction ; il
comporte les opérations effectuées et les conclusions de l'expert.
Les parties en prennent connaissance et disposent d’un délai pour
demander une contre-expertise, ou un complément d'expertise.
L’ordonnance de refus de nouvelle expertise doit être établie dans
le mois suivant la réception de la demande.
Enquêtes de personnalité
L'enquête de personnalité est obligatoire en matière criminelle,
facultative en matière correctionnelle ou contraventionnelle (art.
81 al. 6 du CPP). Elle a pour objet de personnaliser les peines
(sanctions plus individualisées), en vue d’une meilleure
réinsertion sociale. L’enquête de personnalité diffère de
l’expertise ; elle est effectuée par un officier de police
judiciaire de manière générale.
Il s’agit de décrire la personnalité de l’individu mis en examen
par le biais de son environnement social, et donc de sa situation
sociale, ou familiale.