Mise à jour : January 2016

Liberté d'expression en France

La liberté d’expression constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique, l’une des conditions primordiales de son progrès et de l’épanouissement de chacun » selon la Cour européenne des droits de l’homme (Handyside contre Royaume-Uni, 1976).

Garanties nécessaires à la liberté d’expression

Les textes garantissant la liberté d’expression

La liberté d’expression est garantie par de nombreux textes.

La première proclamation de la liberté d’expression date de 1776, date à laquelle les Etats-Unis adoptent leur Constitution. En France, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) de 1789 reprendra ce droit fondamental, qui relève de valeurs aussi bien laïques que démocratiques. Libérés de l’emprise monarchique, les français veulent s'émanciper de l’oppression qu’ils ont connue ; ils veulent pouvoir parler, s’exprimer, et faire connaitre leurs opinions sans restriction. C’est ainsi que l’article 11 de la déclaration dispose que « tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement ».

La DDHC étant insérée dans le préambule de la Constitution de 1958, elle dispose depuis une décision du Conseil Constitutionnel d’une valeur constitutionnelle. Ainsi, la liberté d’expression a une valeur importante et doit être garantie par les pouvoirs publics.

Parallèlement à la liberté d’expression dans sa stricte définition, d’autres libertés viennent s’ajouter afin de faciliter sa mise en application. Le champ d’application de la liberté d’expression est large, et se confond avec d’autres libertés. En effet, la mise en œuvre de la liberté d’expression repose notamment sur la liberté offerte aux médias, et donc à la presse, comme à Internet. Elle a été garantie par la loi du 29 juillet 1881 qui retire les obligations d’autorisations préalables à la diffusion. Régi par la loi du 21 juin 2004, Internet, cet outil permet la communication internationale en très peu de temps et constitue donc un élément indispensable à la garantie de la liberté d’expression.

Autres corolaires de la liberté d'expression, les libertés collectives. Les manifestations et les réunions sont ainsi autorisées et permettent d'exercer sa liberté d'expression. Les réunions ne font l’objet d’aucune déclaration préalable et sont relativement libres. Dans le cadre des manifestations règlementées par le décret-loi du 23 octobre 1935, celles-ci doivent faire l’objet d’une déclaration préalable.

Enfin la liberté d’expression est également garantie par la Convention européenne des droits de l’homme. L’article 10 regroupe « la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière ».

La liberté d’expression est donc garantie par un certain nombre de droits dont le citoyen peut se prévaloir directement en France.

La démocratie, corolaire de la liberté d’expression

Le principe démocratique repose sur la liberté de chaque citoyen d’exprimer ses idées, ses opinions. La démocratie exige donc que chacun tente de convaincre les autres, échange avec les autres, et s’exprime avec les autres.

La démocratie constitue un socle de la liberté d’expression. Elle offre le cadre permettant une libre expression des opinions politiques, les débats constituant le fondement de la démocratie. La liberté d’expression repose donc sur la diversité, les antagonismes. Elle appelle donc à un respect d’autrui afin que chacun puisse vivre sa citoyenneté de manière libre et égalitaire.

Atteintes à la liberté d’expression

La limitation générale à la liberté d’expression

La liberté d’expression est garantie, mais elle n’est pas absolue et des limitations sont nécessaire afin d’assurer le respect de l’ordre public. En effet, selon l’adage « la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres », toute liberté ne peut être entièrement satisfaite. Il est donc important de poser des limites à toute liberté, sans lesquelles aucune des libertés ne peut réellement s’exercer.

Si l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen établit des droits, il établit également des limites : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. » Ainsi, la préservation de l’ordre public justifie la limitation de la liberté d’expression, bien que la notion d'ordre public soit une quelque peu vague, et dont les contours restent peu clairs.

L’article 2212 du Code général des collectivités territoriales le définit par les termes de sécurité, de salubrité et de sûreté publique. Cette notion s’applique donc de manière souple en raison de l’imprécision du texte. En fonction des périodes, la notion sera donc interprétée différemment. Aussi, on peut se fonder sur la notion de moralité pour limiter la liberté d’expression. Cette dernière notion est en effet importante puisqu’elle constitue un élément constitutif de la notion d'ordre public. La moralité est cependant une notion vague qui doit pourtant se fonder sur des circonstances concrètes et non abstraites ; étant une notion collective, la moralité justifie de manière large la limitation des libertés.

De même, la notion de « diffamation » permet de porter atteinte à la liberté d'expression afin de protéger les personnes visées.

L’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme affirme ainsi : « L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires [...] ». Ainsi, la liberté d’expression ne doit pas mettre en place des seuls droits, mais doit émettre des devoirs afin que chacun puisse exercer ses droits de la manière la plus libre possible. Il faut donc nécessairement que des atteintes soient portées à la liberté d’expression. Ainsi, la liberté d’expression n’est pas garantie pour tous. Il en est ainsi des hauts fonctionnaires, soumis à l’obligation de réserve (magistrats, membres du Conseil d’Etat…). La jurisprudence participe à la fixation des limites : Dame Kowalewski, 1955, CE ; en l’espèce, un agent de la poste participait à une manifestation interdite par le Gouvernement.

Limitations plus spécifiques à la liberté d’expression

Les divers moyens permettant la liberté d’expression font l’objet de limitations. Ainsi, la presse doit parfois limiter les propos tenus dans ses articles en raison notamment des délits de provocation à la haine et de discrimination raciale. La loi Gayssot de 1990 interdit ainsi par exemple la négation du génocide juif. Dans un autre contexte, un texte punit également « l'offense au Président de la République ».

Certains ont mis en cause les limitations à la liberté d'expression de la presse. Ainsi, en 2015, l’annonce de la suppression des “Guignols” sur Canal + avait provoqué de vives réactions, certains dénonçant une “attaque contre la liberté de penser”. De la même façon, en 2015, le chroniqueur d’une radio dénonçait un « boycott punitif » de la part du ministère, allant jusqu’à évoquer des « pressions proches d’une censure » après avoir été remercié après une chronique mettant en cause l’efficacité des forces de sécurité durant les attentats de novembre. http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2015/11/23/rmc-guenole-remercie-pour-une-chronique-contestee-sur-la-gestion-des-attentats_4815715_3236.html

La presse voit également sa liberté d'expression limitée par les pressions, les menaces de suppression de fonds publicitaires, le harcèlement judiciaire qui sont des moyens de censurer la presse. Informer n’est pas un délit, sous la direction de Fabrice Arfi et Paul Moreira, Calmann-Lévy, 2015.

Mais la presse n’est pas le seul moyen d’expression qui subit des restrictions. Le cinéma, bien qu’il soit l’un des grands moyens permettant la liberté d’expression, ne peut également s’exercer de manière totalement libre. Des visas d’autorisations doivent obligatoirement être demandés, ce qui leur octroi ou non certaines aides financières.

Internet est également visé, et la loi de 2014 relative à la lutte contre le terrorisme.a introduit le délit d'apologie du terrorisme.