Aussi, la loi LOPPSI II du 14 mars 2011 a donné de nouvelles
perspectives aux enquêteurs (fichiers d’antécédents, fichiers
d’analyse stérile).
Malgré l'importance des mesures d'enquête, des limites ont été
fixées afin de mieux protéger les individus.
Réquisitions judiciaires
Les réquisitions sont possible dans tout établissement privé ou
public, toute administration publique et pour toute personne.
Le secret professionnel ne peut pas être opposé (puni de 3 750
euros d'amende), sauf motif légitime. Les avocats, huissiers,
notaires, médecins et journalistes disposent d'une choix de réponse
à des réquisitions ; néanmoins, s'ils refusent, une perquisition
pourra être menée sans leur consentement dans le cadre d'une
enquête de flagrance (il est également possible de passer outre
l’assentiment lorsque les infractions sont punies d’au moins 5 ans
d’emprisonnement).
Constatations techniques et scientifiques
Une "personne qualifiée" (issue d'une liste d'experts
judiciaire, ou toute personne prêtant serment d'apporter son aide à
la police) peut procéder à des examens techniques et à des
constatations. Cette personne a l'obligation de déférer à la
réquisition de l'autorité.
La réquisition est demandée par l'officier de police judiciaire
pour les infractions flagrantes, au procureur de la République pour
les enquêtes préliminaires.
Une autopsie pourra alors être demandée en vertu des articles 60
et 77-1 du Code de procédure pénale.
Perquisitions, visites domiciliaires
La perquisition est une mesure coercitive qui permet de
rechercher des indices dans un lieu déterminé. Elle se déroule chez
une personne soupçonnée d'être impliquée dans la commission de
l’infraction. Les perquisitions n'ont pas seulement lieu au
domicile du suspect, elles concernent toutes les « personnes qui
paraissent avoir participé au crime ou détenir des pièces ou objets
relatifs aux faits incriminés ».
Elle relève d'une décision de l'officier de police
judiciaire.
Notion de domicile
Les perquisitions ont lieu au domicile des intéressés. Par
domicile, on entend non seulement le lieu d'habitation principal,
mais aussi tous les lieux dans lesquels la personne peut se dire
chez elle, quel que soit son titre d'occupation ou l'affectation
des lieux. Il peut aussi bien s’agir d‘une chambre d’hôtel que d’un
bureau ou d'une tente, l'important étant qu'il s’agisse d’un
endroit clos.
Les mesures d'enquête coercitives doivent être conciliées avec
le principe d'inviolabilité du domicile. Néanmoins, la perquisition
est possible sans l'assentiment de la personne dans le cadre d'une
enquête de flagrance. L'assentiment est en revanche nécessaire dans
l'enquête préliminaire (déclaration écrite de l'intéressé) ;
cependant, le procureur de la République peut passer outre le
consentement de la personne (lorsqu’il s’agit d’un crime ou d’un
délit puni d’au moins 5 ans d’emprisonnement, et que la
perquisition est nécessaire).
Déroulement de la perquisition
La perquisition est effectuée par un Officier de Police
Judiciaire dans la majorité des cas.
La personne perquisitionnée (ou un représentant de son choix, ou
deux témoins choisis pas l'officier de police judiciaire) doit être
présente dans le lieu au moment de la perquisition. La perquisition
doit s’effectuer aux heures légales (entre 6 heures et 21 heures),
excepté en matière de trafic de stupéfiant ou de terrorisme (les
perquisitions de nuit sont alors autorisées).
Des mesures particulières sont mises en place lorsqu'il s'agit
de perquisitionner un cabinet d’avocat ou de médecin (ex : les
perquisitions peuvent être effectuées par un magistrat, en présence
d'un représentant de la profession, etc.).
L'absence de respect des obligations relatives à la mise en
oeuvre de la perquisition conduit à la nullité textuelle (pour une
enquête de flagrance : art. 59 al. 2 du Code de procédure pénale)
ou à la nullité substantielle pour une enquête préliminaire.
Garde à vue
La garde à vue est « une mesure de contrainte décidée par un
officier de police judiciaire » (art. 62-2 du CPP).
Cette mesure a fait l'objet d'une évolution récente. La Cour
européenne des droits de l'homme a affirmé le droit pour une
personne placée en garde à vue d'être assistée par un avocat (arrêt
Dayanan contre Turquie du 13 octobre 2009. Suite à cet
arrêt, la Cour de cassation a rendu trois arrêt le 19 octobre 2010
par lesquelles elle affirmait que la décision QPC du 30 juillet
2010 faisait écran à l’application de la Convention européenne des
droits de l’homme. Finalement, la loi du 14 avril 2011 relative à
la garde à vue instaure un nouveau régime.
Conditions et conséquences chez les majeurs
La garde à vue n’est possible qu’en matière criminelle ou
correctionnelle (délit puni d’une peine d’emprisonnement) et doit
être justifiée par certains motifs (art. 62-2 du CPP : elle doit
permettre les investigations impliquant la personne, empêcher la
modification des preuves par la personne, etc.). La personne placée
en garde à vue ne peut plus être un simple témoin, des indices
ayant du être trouvés qui la concernent.
Les officiers de police judiciaire peuvent seulement placer en
garde à vue les personnes à l’encontre desquelles il existes une ou
plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elles ont commis ou
tenté de commettre une infraction. Ils doivent en avertir le
procureur de la République ; ce dernier peut lui-même demander le
placement d'une personne en garde à vue. Il appartient également au
procureur de décider du maintien de la personne en garde à vue : il
doit juger de sa nécessité et de sa proportionnalité.
La durée de la garde à vue est de 24 heures maximum, durée
susceptible d’être prolongée de 24 heures avec l’accord du
procureur de la République (autorisation écrite et motivée du
procureur de la République, qui s'est vu présenter la personne
placée en garde à vue). Cependant, en matière de criminalité
organisée, de terrorisme ou de trafic de stupéfiant, la durée peut
être de quatre jours (deux prolongations autorisées de 24
heures).
La personne placée en garde à vue dispose de droits :
- Respect de la dignité humaine (pas de violences policières,
etc.)
- Information de la personne sur ses droits dans une langue
qu'elle comprend
- Droit à un examen médical : le médecin est désigné par
l'officier de police judiciaire ou le procureur de la République.
Le certificat rendu par le médecin ne les lie pas mais peut
conduire à une nullité s’ils décident de poursuivre la garde à vue
contre l'avis médical
- Droit d’être assisté par un avocat : la personne peut
s’entretenir avec un avocat à sa demande. L’avocat est désigné par
l’intéressé, par les personnes informées de sa garde à vue ou
d’office par le bâtonnier. La personne peut ensuite être assistée
au cours de ses auditions et des confrontations (loi du 14 avril
2011)
- Possibilité pour la personne placée en garde à vue de faire
prévenir par téléphone un proche
- La personne peut ou non répondre aux questions de son
interlocuteur.
La garde à vue peut faire l’objet d’un enregistrement
audiovisuel (loi du 5 mars 2007) et doit faire l’objet de
différents écrits : procès-verbaux, énoncé des motifs de la garde à
vue, etc. Ces mentions doivent être émargées par la personnes
placée en garde à vue.
A la fin de la garde à vue, la personne peut être remise en
liberté, ou déférée au parquet. Une instruction peut ensuite être
ouverte, par le biais de la procédure de comparution immédiate.
Mineurs
Pour les mineurs, la garde à vue diffère résulte d'un régime
issu de l’ordonnance du 2 février 1945.
- Pour les mineurs de moins de treize ans : le mineur ne peut
être placé en garde à vue, sauf exception ; la rétention est
possible en cas d’indices graves ou concordants sur la commission
d'un crime ou d'un délit puni d'au moins 5 ans d'emprisonnement, si
la rétention est justifiée et si le mineur est âgé de 10 à 13 ans.
Dans ce cas, la durée de rétention ne pourra excéder 12 heures
(prolongation possible de 12 heures.
- Pour les mineurs de plus de treize ans : le placement en garde
à vue est possible sous le régime de droit commun. Néanmoins, la
durée ne pourra pas être prolongée pour les délits punis de moins
de 5 ans d'emprisonnement lorsque le mineur a de 13 à 16 ans.
Auditions
Toute personne peut être convoquée par l'officier de police
judiciaire pour une audition, qu’elle soit suspecte ou témoin, afin
d’apporter de nouveaux éléments à l’enquête. Sous serment, la
personne interrogée doit apporter les renseignements dont elle a
connaissance.
La personne convoquée a l'obligation de se présenter à la
convocation sous peine de procès verbal. En effet, l’officier de
police judiciaire pourra contraindre la personne par la force
publique, sur autorisation du procureur de la République.
Cependant, celle-ci n’est pas obligée de déposer (contrairement à
l’audition lors d’une instruction). Si la personne n’est aucunement
suspectée, elle ne sera retenue que le temps strictement nécessaire
à l’audition (au maximum quatre heures).
L'audition, effectuée par l'officier de police judiciaire ou un
agent de police judiciaire, donnera lieu à la rédaction d'un procès
verbal. Le Conseil constitutionnel a admis l'audition libre (sans
assistance d'un avocat) dans sa décision QPC du 18 novembre
2011.
Lorsqu'il existe des raisons plausibles de soupçonner que la
personne a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni
d’une peine d’emprisonnement, elle ne peut rester à la disposition
des enquêteurs qu’en étant placée en garde à vue.
Contrôle d'identité
Cette mesure est prévue par l'article 78-2 du Code de procédure
pénale. Elle est effectuée par un officier de police judiciaire ou
par un agent placé sous sa direction. Elle peut être mise en place
dans le cadre d’une mission judiciaire ou d’une mission
administrative.
- Dans le cadre d’un contrôle de police judiciaire (lors d'une
enquête ou d'une instruction) : à l’égard d’une personne dont il
existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou
tenté de commettre une infraction, qui se prépare à commettre un
crime ou un délit, qui peut fournir des renseignements utiles, ou
qui fait l’objet de recherches.
- Dans le cadre d’un contrôle administratif (loi du 10 août 1993)
: pour prévenir une atteinte à l’ordre public. Il faut néanmoins
justifier de circonstances particulières motivant le contrôle ; de
plus, il ne doit pas s'agir d'un contrôle généralisé et
discrétionnaire (décision n° 93-323 DC du 5 août 1993).
La preuve peut être fournie par tout moyen : le port de la carte
d’identité n’étant pas obligatoire, une carte officielle portant la
photo de la personne suffit. Si la personne ne porte aucun papier
sur elle, ou si elle refuse de justifier son identité, elle devra
se soumettre à une vérification d’identité, qui entraîne une
rétention policière. Une fois l’identité vérifiée, toute
information relative à cette procédure devra être détruite.
Contrôles d'identité applicables aux étrangers
Le contrôle d’identité peut être régi par des textes
particuliers : c’est notamment le cas des contrôles relatifs
aux étrangers.
L’ordonnance que 2 novembre 1945 prévoit « qu’en dehors de
tout contrôle d’identité, les personnes de nationalité étrangère
doivent être en mesure de présenter les pièces ou documents sous le
couvert desquels elles sont autorisées à circuler ou séjourner en
France à toute réquisition des officiers de police judiciaire et,
sous l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, des agents de
police judiciaire et agents de police judiciaires
adjoints ».
Dans ce cas, le contrôle doit s’effectuer sur la base d’éléments
extérieurs d’extranéité (qui ne relèvent pas, par exemple, de la
couleur de peau, mais plutôt de l’immatriculation d’un véhicule ou
de la provenance de bagages), qui garantissent le respect des
droits de la personne. Ainsi, la loi du 24 août 1993 prévoit que
que le contrôle doit être effectué sur la base d’éléments
objectifs, comme l'a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du
6 juin 2012 par lequel elle a considéré contraire au droit
communautaire la demande des agents de police judiciaire de
demander de présenter un titre de séjour en dehors de tout contrôle
d'identité et sans exiger d'éléments subjectifs. Ainsi, lorsque la
personne étrangère ne peut présenter de titre de séjour, la loi du
31 décembre 2012 prévoit une retenue pour vérification de situation
d'une durée maximale de 16 heures.
Aussi, des contrôles d’identité peuvent avoir lieu dans le cadre
de polices spéciales, attachées au contrôle des frontières.
Autre mesures d'enquêtes
Dans les cas de recherche de personnes en fuite, l’article 87 de
la loi du 9 mars 2004 introduit un type d’enquête susceptible
d’être mis en œuvre seulement par le procureur de la République. Il
permet de ne pas faire appel à l’enquête préliminaire ou à
l'enquête de flagrance. L’enquête peut être menée lorsque la
personne fait l’objet d’un mandat d’arrêt.