Il est nécessaire de déterminer la nature publique ou privée du
contrat puisque le régime applicable en découle. Pour cela, des
critères sont à identifier.
Critère organique : les cocontractants
Il s’agit d’un critère permanent. Quand une personne publique
est contractante, on considère le contrat comme administratif dès
lors qu’il satisfait également au critère matériel.
Contrats entre personnes publiques
Lorsque le contrat est passé entre deux personnes publiques, il
est en principe administratif. C’est ce que l’arrêt UAP de
1983, du Tribunal des conflits, établi en présumant administratifs
ces contrats car ils participent « normalement à la rencontre de 2
gestions publiques ».
Mais un contrat établi entre deux personnes publiques peut être
de droit privé lorsque, eu égard à son objet, il ne fait naître que
des rapports de droit privé » (arrêt UAP précité).
Contrats entre personnes privées
Lorsque le contrat est conclu entre deux personnes privées,
c’est en principe un contrat de droit privé (même si le critère
matériel est vérifié).
Mais il existe des exceptions à ce principe. Une personne privée
peut disposer d’un mandat par laquelle elle représente une personne
publique. Aussi, elle peut agir pour le compte d’une personne
publique ; l’arrêt Société Entreprise Peyrot du Tribunal
des conflits en 1963 consacre cette possibilité (en l'espèce, il
n'y avait aucun mandat). Dans cet arrêt, le Tribunal des conflits
considère que la construction des routes nationales "appartient par
nature à l'Etat", et que par conséquent, celui qui l'assure agit
pour le compte de l'Etat, quelle que soit sa qualité (personne
morale de droit public, société d'économie mixte, etc.). Cette
solution est retrouvée dans d'autres arrêts, et notamment celui de
1976, Dame Culard, qui concernait le Crédit foncier de
France ; les prêts étaient consentis pour le compte de l'Etat (car
la société étant engagée envers l'Etat à passer ces contrats avec
des particuliers français dans le cadre du service public d'aide
aux expatriés français de Tunisie). Cette tendance à limiter
l'importance du critère organique est similaire à celle que le
droit communautaire semble adopter.
Critère matériel : l'objet et le contenu du contrat
Il s’agit d’un critère alternatif en ce sens que l’une ou
l’autre des conditions doivent être remplies. Cela a été déterminé
par l’arrêt Epoux Bertin, de 1956 du Conseil d’Etat.
Lorsque le critère organique est satisfait, le critère matériel
doit être vérifié pour déterminer le caractère administratif du
contrat. Deux éléments peuvent permettre d’établir le caractère
public du contrat.
Clause ou régime exorbitant
Clause exorbitante
Si un contrat est conclu par une personne publique et que
celui-ci contient une ou plusieurs clauses exorbitantes, il est
considéré de droit public. Cette solution a été retenue par l’arrêt
Société des granits porphyroïdes des Vosges du Conseil
d’Etat de 1912. Cet arrêt ne définit pas pour autant la notion de
clause exorbitante ; c’est donc la jurisprudence postérieure qui
s’en est chargée. Il s’agit donc de clauses assurant à la personne
publique des droits plus importants, montrant ainsi le caractère
particulier du contrat, qui ne repose pas sur une égalité des
cocontractants (à la différence du droit privé) mais sur un élément
d’unilatéralité. C’est donc une clause étrangère à celles que l’on
peut rencontrer en droit privé. On regarde donc le contenu même du
contrat, et pas sa finalité. Le juge administratif a ainsi
considéré qu’une clause de résiliation unilatérale de
l’administration en l’absence de faute du cocontractant était une
clause exorbitante.
Régime exorbitant
Cette notion a été appliquée par le Conseil d’Etat, qui avait
rendu un arrêt en 1973, Société d’exploitation de la rivière du
Sant à l'occasion d'un refus de contracter. En l’espèce, un
contrat avait été conclu entre EDF et un producteur d’électricité
(personne privée) ; le juge avait relevé des dispositions dans le
contrat faisant état de sa nature publique et donc de l'application
du régime de droit public (parmi ces dispositions, l’obligation de
conclure ces contrats).
L’objet du contrat, et l’exécution d’un service public
On regarde dans ce cas l’objet du contrat, et non plus le
contrat lui-même, pour déterminer le caractère public du
contrat.
L’objet du contrat révèle parfois de façon évidente
l’application du régime de droit public. Ainsi des marchés publics,
des contrats de partenariat, des contrats portant occupation du
domaine public ou encore des contrats relatifs à des travaux
publics.
Le régime de droit public s'applique également aux contrats
ayant pour objet l’exécution même du service public. L’arrêt
Thérond du Conseil d’Etat de 1910 établissait ainsi
l’importance du « but de service public » du contrat pour justifier
l'application du régime de droit public. Il s’agissait en l’espèce
d’un contrat par lequel la ville de Montpellier avait confié au
sieur Thérond la capture des chiens errants et des bêtes mortes ;
le juge administratif avait ainsi considéré le contrat
administratif dans la mesure où le sieur Thérond était considéré
associé au service d’hygiène et de salubrité de la ville (qui est
un contrat d’exécution du service public).
Pour que le régime de droit public soit appliqué, il est
nécessaire qu'il ne s'agisse pas d’une simple collaboration, mais
d'une réelle participation à l’exécution du service public.
L'exécution même du service public peut donc être confiée à l'un
des contractants. C'est ce qu'il ressort de l'arrêt Epoux
Bertin de 1956 : l'administration était considérée comme ayant
confié la gestion d'étrangers par un contrat administratif. Mais le
contrat peut n'être que "l'une des modalités de l'exécution même de
ce service" (Consorts Grimouard de 1956) : en l'espèce,
l'exécution même du service public n'est pas confié à une personne
privée, mais les opérations qu'elle effectuent en constituent une
modalité.