Mais si le Code civil propose les critères de définition du
domaine public, c’est bien la jurisprudence qui les établi de
manière claire. Celle-ci a beaucoup élargi le domaine public afin
de permettre au juge administratif un accroissement de ses
compétences puisque le domaine public relève du droit public et
donc du juge administratif.
La définition de la domanialité publique a été établie par le
projet de la Commission de réforme du Code civil en 1947. Selon ce
texte, « appartient au domaine public l’ensemble des biens des
collectivités publiques et établissements publics qui sont soit mis
à la disposition directe du public usager soit affectés à un
service public ».
Mais les principaux critères de la domanialité publique sont
établis par la jurisprudence qui en considère deux : l’affectation
et l’appartenance à une personne publique. On peut rajouter à ces
critères la notion d’aménagement spécial.
L’appartenance à une personne publique
Une personne privée ne peut posséder un domaine public. Ce
principe a été affirmé par l’arrêt Association saint pie V et saint
pie X de l’Orléannais, CE, 1990. De même, le Conseil d’Etat exclu
du domaine public les voies privées par l’arrêt Commune de Mouveau
en 1989.
Ainsi, les biens doivent être déclassés lorsque le propriétaire
devient une personne privée. C’est le cas lors des privatisations.
Cela a été mis en place par l’article 1 de la loi du 26 juillet
1996.
Mais il peut exister une délégation de service public, ou une
régie directe. Dans le cas d’une concession, il faut tenter de
savoir à qui appartiennent les biens en distinguant trois types de
biens : les biens de retour, les biens propres et les biens de
reprise. Ces biens se distinguent en fonction du moment
d’appartenance à la personne publique.
Si des solutions sont finalement trouvées, le problème s’est
posé pour les établissements publics. On a longtemps considéré que
les établissements publics ne pouvaient être reconnus dans la
domanialité. Finalement, la jurisprudence a tranché par les arrêts
Epp (1981, CE) et Mansuy (1984, CE) en admettant que les
établissements publics pouvaient être propriétaires d’un domaine
public. Il a également été admis que les établissements publics
industriels et commerciaux pouvaient avoir un domaine public.
Toutes les personnes publiques peuvent disposer d’un domaine
public. Cependant, le régime alors applicable est différent de
celui qui s’applique en droit privé. Selon les biens, la protection
sera différente ; en ce sens, il est nécessaire de définir les
critères d’affectation au service public ou à l’utilité
publique.
Affectation du bien
L’affectation à l’utilité publique constituait un critère
important auquel est venu s’ajouter celui de l’affectation à un
service public.
L’affectation à l’usage de tous a été consacrée par un arrêt du
Conseil d’Etat statuant à propos des cimetières : Marécar, 1935.
Cet arrêt établit que le cimetière « est affecté à l’usage du
public » et doit « dès lors être compris parmis les dépendances du
domaine public ». Ainsi, la seule affectation à l’usage du public
entraine son appartenance au domaine public.
L’affectation au service public a initialement été défendue par
Duguit. Mais cette large conception devait être limité afin
d’éviter des dérives. Ainsi, la jurisprudence a rendu un arrêt de
principe en la matière : Soc. Le Beton, 1956, CE. En l’espère, des
terrains avaient été loués par une société privée près d’un port
dans un but privé ; il s’agissait alors de connaitre le juge
compétent. Les terrains participant au fonctionnement du port, le
Conseil d’Etat a estimé qu’ils faisaient parti du domaine
public.
L’aménagement spécial
L’arrêt précédemment cité Société Le Béton a ajouté la condition
d’un aménagement spécial. En effet, il faut dans certains cas
adapter le bien aux besoins du service. Il s’agit donc de travaux
plus ou moins important effectués sur le bien afin que celui-ci
puisse relever du domaine public. Cette jurisprudence a ensuite été
confirmée par l’arrêt Berthier de 1960 du Conseil d’Etat qui
demandait un aménagement spécial pour considérer que le bien
relevait du domaine public. Ainsi, la jurisprudence a considéré
dans certains cas que la seule affectation suffise à déterminer la
domanialité publique.
Mais cette notion est quelque peu floue puisque l’importance des
travaux n’est parfois pas prise en considération, et des
distinctions sont ajoutées comme la proximité du bien à une gare
(Soc. Lyonnaise des transports, 1965, CE).
Il a été considéré qu’il n’y avait pas d’aménagement spécial
dans le cadre des bois et forêts (Abamonte, 1975, CE).
On peut donc considérer que la notion d’aménagement spécial a
été rendu secondaire par la jurisprudence, même s’il existe des cas
dans lesquels cette notion reste importante.