Toute personne
a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux
de la santé ». La Charte de l’environnement, adoptée le 28
février 2005 par le Parlement a recueilli plus de 95% des
suffrages. Elle reconnait pour la première fois en droit français
un droit à chacun de pouvoir bénéficier d’un environnement sain et
respectueux de la santé. Cette innovation s’inscrit dans la droite
lignée des droits de l’homme en attribuant à cette Charte une
valeur élevée au même niveau que les droits de l’homme et du
citoyen de 1789 et des droits reconnus par le préambule de 1946.
Cette insertion marque l’importance de droit nouveau.
Un
droit nouveau
Evolution de la
notion d’environnement
Le droit à un
environnement sain semble constituer aujourd’hui une nouveauté
importante dans la société actuelle. Il reconnait des droits
longtemps ignorés tels que celui de vivre dans
un environnement équilibré et respectueux de la santé. Les
pensées ont
évolué, les mentalités ont changé, et un nouvel intérêt pour
l’environnement est progressivement apparu. Cependant, il a fallu
beaucoup de temps. En effet, l’ensemble des lois fondamentales
relatives aux libertés publiques ne faisait pas référence à
l’environnement. Ni la Déclaration Universelle des droits de
l’Homme et du Citoyen de 1789, ni le préambule de la Constitution
de 1946 ne mentionnait un quelconque droit à l’environnement. On ne
prend alors en compte que les droits civils et politiques,
économiques et sociaux. Cependant, si le droit français ne faisait
pas référence à l’environnement, certaines conventions
internationales commençaient à prendre en compte la protection des
animaux, et ainsi l’environnement.
Le protocole de
Kyoto constitue donc une première manifestation de l’intérêt
mondial pour l’environnement.
Evolution des
droits
Les droits dits
de première et deuxième génération n’établissaient pas de droit à
l’environnement. La question est apparue plus tard, dans le cadre
des droits dits de solidarité. Ces droits ont émergé dans les
doctrines des années 90. Ils auraient pour objet de tendre à une
solidarité nationale. Le droit à l’environnement semble faire
partie de cette troisième génération de droits. Il considère
l’homme dans son rapport avec ce qui l’entoure, et avec les
changements qui s’effectuent plus ou moins naturellement. C’est une
nouvelle approche des libertés en ce sens que la logique est
différente. En effet, on reposait les libertés fondamentales sur
des notions concrètes ; dans le cas du droit à
l’environnement, il semble qu’on repose les textes sur des
évènements futurs, et essentiellement scientifique. Alors que les
droits économiques et sociaux se basent sur un contexte
contemporain, le droit à l’environnement se base sur des fondements
plus théoriques. Un rapport entre l’homme, la nature et la science
est donc mis en place ; il s’agit d’un rapport nouveau dans
les libertés fondamentales. Cependant, le droit à l’environnement
se rapproche des autres droits fondamentaux en ce sens qu’il
rapporte des considérations philosophiques, et une manière propre à
notre temps de rapporter les problèmes actuels de la
société.
La
Charte de l’environnement
Présentation de
la Charte
La Charte de
l’environnement de 2004 établit plusieurs choses. Tout d’abord,
elle a un aspect théorique puisqu’elle rappelle un certain nombre
de constats, tels que les « modes de consommation ou de
production », qui ont affecté l’environnement. Elle évoque
aussi le fait que l’humanité vit grâce aux ressources naturelles
apportées par son environnement. Les premiers considérants
rappellent l’indissociabilité de l’homme avec ce qui l’entoure et
la nécessite de son maintien en l’état. La Charte évoque même le
« patrimoine commun » des êtres humains qu’est
l’environnement ; cette notion implique l’affectation au seul
intérêt général ou encore la non-appropriation. Cela permet à la
Charte d’affirmer la nécessité de le préserver de manière durable.
Ces considérants conduisent ensuite de manière plus concrète à la
proclamation des droits et des devoirs.
Des
principes se dégagent également du droit à l’environnement.
Ainsi, le principe de précaution est mis en place ; s’agissant
d’un droit qui évolue, les mesures prises doivent suivre ce
principe. De même, il existe également un principe d’information et
de participation ; cela a pour objet de responsabiliser les
citoyens à leur nouveau devoir de protection de l’environnement.
Ces principes sont une notion nouvelle qui implique un nouvel
esprit relatif aux droits fondamentaux. En effet, on peut voir que
toute personne se trouve en somme engagé par ce nouveau droit, ce
qui constitue une évolution importante en matière de
liberté.
La Charte pose
les principales bases que les lois permettront d’appliquer. Mais
elle met en place une notion nouvelle qui engage l’homme lui-même
dans le processus de protection. L’homme doit ainsi désormais agir
sur ce qui l’entoure : il doit « contribuer à la
réparation des dommages » qu’il cause à l’environnement. Les
pouvoirs publics doivent également intervenir. L’article 2 de la
Charte de 2004 dispose que « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à
l’amélioration de l’environnement ». Il existe en effet dans
le droit à l’environnement une dimension collective, une volonté de
travailler ensemble pour le bien-être de chacun. Mais pour
certains, ces droits relèvent plus d’une vision du monde que d’une
réalité du droit positif. Cependant, il ne s’agit pas simplement
d’une énumération de considérations philosophiques, et comme nous
l’avons vu, des devoirs importants
incombent à toute personne.
Le droit à
l’environnement est une notion qui parait quelque peu vague en ces
termes, et qui ne semble pas disposer de réelle portée juridique.
Pourtant, plusieurs textes assurent son effectivité.
Portée de la
Charte
La portée de la
Charte a été un sujet controversé par la doctrine, les uns
pensant qu’elle avait une réelle valeur constitutionnelle, les
autres une simple importance déclarative. Cependant, nous avons pu
constater le poids du droit à l’environnement dans les réformes des
pouvoirs publics. Ainsi, si on peut considérer que certains droits
reconnus par la Charte n’ont qu’une valeur politique, d’autres ont
une réelle portée juridique.
Le droit à
l’environnement va surtout être réellement effectif par le biais du
juge des référés puisqu’aucune décision administrative n’est
alors nécessaire. C’est par le référé liberté que le juge peut
reconnaitre une liberté fondamentale, et c’est ce qu’il a fait dans
sa décision du 29 avril 2005, Conservatoire du patrimoine
naturel et autres. En l’espèce, la manifestation
« Teknival » devait avoir
lieu, et les requérants établissaient que sa tenue engendrerait une
atteinte à l’environnement puisque le site avait une certaine
valeur environnementale. C’est par cette décision que la
jurisprudence a donné la valeur de la Charte en établissant que le
droit à l’environnement est une « liberté fondamentale »
de valeur constitutionnelle. Cette valeur lui confère une
importance réelle, et une garantie de son application.
Conséquences de
la Charte
Le grenelle de
l’environnement avait été mis en place en 2007. D’importantes
mesures destinées à mettre en pratique les déclarations relevant
notamment de la Charte de l’environnement ont été établies. Ainsi,
les principes de la Charte comme celui du pollueur payeur trouvent
une réelle effectivité dans la réalisation de ces mesures.
Plusieurs thèmes comme la lutte contre les changements climatiques
ou la construction d’une démocratie écologique ont permis d’assurer
le droit à l’environnement.
L’ensemble de
ces dispositions relatives au droit à l’environnement lui confère
une valeur importante. Ce nouveau droit consacre donc une nouvelle
liberté qui selon la jurisprudence, mais aussi une partie de la
doctrine, semble être une liberté fondamentale. Si cette petite
révolution dans le droit français a une réelle importance, la
portée large de ce droit peu entrainer une inflation des actions en
justice sur ce fondement. Ainsi, l’ancien vice-président du Conseil
d’Etat en 2005 rappelait que «L'Etat ne
peut non plus être l'assureur multirisques de toute la
population».