Procédure de la révision
L’article 89 de la Constitution prévoit la procédure de révision
de la Constitution, mais ce n’est pas sur ce seul fondement que les
révisions ont été effectuées. Ainsi, la révision de 1962 prévoyant
l’élection du président de la République au suffrage universel
direct s’appuie sur l’article 11 de la Constitution.
L’utilisation de l’article 11 de la Constitution a suscité de
vives critiques car il a permis de modifier des éléments majeurs de
la Constitution. Nombres de juristes ont en effet considéré
contraire à la Constitution l’utilisation de cet article. Le
recours à l’article 11 permettait au Général de Gaulle de passer
outre le vote des assemblées, qui constitue la première phase de la
procédure de l’article 89. Pour cette raison, le Conseil d’Etat a
confirmé indirectement l’inconstitutionnalité de la procédure dans
son arrêt Sarran et Levacher de 1998, par lequel il distingue les
référendums de l’article 11 relatifs aux matières législatives des
procédures de l’article 89 relatives aux matières
constitutionnelles.
L’article 89 prévoit deux types de révision : la procédure «
normale » et la procédure « abrégée ». La procédure normale
nécessite le recours au référendum ; il s’agit donc d’une procédure
très lourde qui demande à la population de s’investir sur des
questions parfois mineures parfois éloignées de leurs
préoccupations. Pour passer outre ces difficultés, la procédure
abrégée permet au Congrès du Parlement d’adopter la loi
constitutionnelle. En pratique, la procédure abrégée est devenue la
procédure normale. Ainsi, la révision de 2008, pourtant très
importante, n’a pas fait l’objet d’un référendum.
Déroulement de la révision
Il revient au président de la République, sur proposition du
Premier ministre et aux membres du Parlement de prendre
l’initiative de révision. Le projet ou la proposition de loi
constitutionnelle sont ensuite soumis pour discussion et vote à
l’Assemblée nationale et au Sénat (prioritaire s’agissant des
questions relatives à l’organisation des collectivités
territoriales) qui doivent l’adopter à la majorité des suffrages
exprimés. Puisqu’il s’agit d’une loi constitutionnelle, une
commission mixte paritaire ne peut être réunie.
Lors de cette procédure, chaque assemblée peut bloquer la
révision.
Après l’adoption du texte, le président de la République décide
de la procédure (abrégée ou normale) qu’il souhaite mettre en
œuvre. Néanmoins, le choix est relatif dans la mesure où la
procédure abrégée ne peut être utilisée que pour les projets de
révision (et pas les propositions). Le président de la République
peut également refuser de poursuivre la procédure.
Une fois le choix effectué par le président de la République, le
Parlement réuni en Congrès se prononce définitivement sur le projet
de loi constitutionnelle. Il doit recueillir les trois cinquièmes
des suffrages exprimés. La grande majorité des révisions a été
adoptée en vertu de l’article 89 par le Congrès. Si au contraire le
président de la République a choisi le référendum, les électeurs
sont convoqués par décret du Président ; le texte est adopté à la
majorité des suffrages exprimés.
Cas de révisions
Depuis 1958, beaucoup de révisions de la constitution ont eu
lieu (plus de vingt). Certaines de ces révisions ont profondément
modifié des éléments entiers du régime, sans toutefois transformer
la structure même du régime.
Parmi les grandes révisions, celle de 1962 a permis l’élection
du Président de la République au suffrage universel direct.
Celle de 2000 a instauré la règle du quinquennat, réduisant à 5
ans le mandat du Président de la République. Ce dernier est donc
élu juste avant les députés, ce qui lui permet d’avoir une majorité
à l’Assemblée qui le soutiendra. Cela permet ainsi d’éviter les
périodes de cohabitation (majorité parlementaire hostile au
Président de la République).
La grande révision de 2008 a quant à elle permit de revaloriser
le rôle du Parlement. Les institutions ont ainsi été remodelées
pour les mettre dans la réalité de leur pratique et rééquilibrer
les pouvoirs au profit du Parlement, qui a obtenu davantage de
pouvoirs dans l’exercice de ses prérogatives (vote et examen des
lois).
Certaines révisions ont touché le Conseil constitutionnel :
élargissement de la saisine en 1971, mise en place de la Question
Prioritaire de Constitutionnalité en 2008 (tout justiciable peut
demander la constitutionnalité de la loi applicable au litige).
D’autres révisions ont été engagées pour permettre à la France
de ratifier les traités européens. Ainsi en 1992, l’adoption du
traité de Maastricht a imposé le transfert de compétences
importantes à l’Union européenne, ce que la Constitution devait
permettre.
Aujourd’hui, un titre est consacré à l’Union européenne au sein
de la Constitution : il intègre la France dans un cadre juridique
et institutionnel qui est au-dessus de la Constitution. Près de la
moitié du domaine qui relève traditionnellement de la loi qui est
élaborée par les institutions européennes (Parlement européen et
Conseil des ministres).
L’ensemble de ces révisions n’ont pas remis en cause les grands
principes de la Constitution.