Mise à jour : February 2013

La IIIème République

Le système mis en place par la Constitution de 1875 est celui qui a perduré le plus longtemps dans l'histoire républicaine française. Régime d’assemblé souvent remis en cause par la suite, il a néanmoins pris fin en 1946, au sortir de la guerre, après avoir traversé de nombreuses crises d’instabilité ; la loi était en effet alors considérée comme l’autorité suprême, insusceptible de remise en cause par un autre pouvoir, ce qui provoquait d'importants blocages. L’importance du Parlement était donc l'élément essentiel de la IIIe République, mais aussi des régimes ultérieurs, avant que la Constitution de 1958 ne vienne remettre totalement en cause cet état de fait.

Création de la IIIe République

La République est proclamée le 4 septembre 1870. Certains députés républicains de Paris comme Jules Ferry ou Gambetta l'appellent le « Gouvernement de la Défense nationale » ; c'est un gouvernement provisoire issu de la capture de Napoléon III à Sedan, consécutive de la défaite de la guerre de 1870 qui a conduit les socialistes d’Auguste Blanqui à mener une insurrection contrée par les républicains, dont Léon Gambetta.

Malgré cette avancée des Républicains, les élections de 1871 conduisent à une victoire des royalistes. Néanmoins, c'est aussi une petite victoire des Républicains. Thiers est nommé « Chef du pouvoir exécutif de la République française », par une loi du 31 août 1871. Mais l’importance quantitative des monarchistes semble remettre en cause les intentions républicaines, tout comme le régime parlementaire.

Ainsi, alors que la guerre contre la Prusse se poursuit, le Président de la République, Thiers, signe la paix en 1871 avant d'être contraint à la démission quelques temps plus tard. En effet, l’Assemblée, de tendance monarchiste et conservatrice, souhaite accroître son pouvoir sur celui du président et vote pour cela la loi de Broglie le 13 mars 1873 qui permet d’atténuer les pouvoirs de Thiers. Face au retour de la monarchie, Thiers affronte l’Assemblée, qui votera finalement sa révocation. Mac Mahon, prend provisoirement sa place ; il est donc nommé pour 7 ans (selon la loi du septennat votée le 20 novembre 1873).

Le 30 janvier 1873 est voté l’amendement Wallon visant à distinguer la présidence de la République de Mac Mahon : l'amendement dépersonnalise le septennat et en fait une mesure ordinaire. L’amendement stipule donc que « Le président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages par le Sénat et la Chambres des députés réunie en Assemblée nationale. Il est nommé pour sept ans ; il est rééligible. »

Caractéristiques de la Constitution

Le sentiment d’une instauration provisoire de la République en vue d’un prochain retour à la monarchie a conduit à l’élaboration d’un compromis entre la monarchie constitutionnelle et la République. Ainsi, la Constitution de 1875 est peu structurée et ne comporte que 34 articles, laissant à la coutume la mise en pratique du reste. Sa procédure de révision est relativement facile à mettre en pratique : « les Chambres auront le droit, par délibérations séparées, prises dans chacune à la majorité absolue des voix, soit spontanément, soit sur la demande du Président de la République, de déclarer qu’il y a lieu de réviser les lois constitutionnelles ». Les révisions devront être adoptées à la majorité absolue des membres composant chacune des Chambres. L’initiative viendra du Président de la République, ou de l’une ou l’autre des Chambres.

Afin de satisfaire à des impératifs démocratiques et républicains, mais pour renforcer le régime parlementaire, un modèle de type orléaniste est envisagé.

Parlement

Cet organe se compose de deux chambres, celle des députés, et celle des sénateurs. Ce bicaméralisme doit permettre de tempérer l’un est l’autre des organes constitutifs du Parlement.

Le fonctionnement du Sénat est fixé par trois lois constitutionnelles de 1875, qui font de cet organe le principal contrebalancier du pouvoir des députés.

Composé de 300 membres, le Sénat comprend 75 membres nommés à vie par l’Assemblée nationale lorsqu’elle élabore les lois constitutionnelles, puis par le Sénat lui-même. Les 225 autres sénateurs sont élus pour 9 ans, par un collège électoral au suffrage universel indirect par les députés, les conseillers généraux, etc. Leur mandat est renouvelable par tiers tous les 3 ans. L’âge minimum requis pour être élu est de 40 ans. La répartition des sièges révèle la prédominance des campagnes sur les villes, considérées comme conservatrices ; Gambetta veut donc créer un « Grand Conseil des communes françaises ».

« Le pouvoir législatif s’exerce par les deux Assemblées ». Le bicaméralisme doit créer un équilibre entre les deux chambres. Néanmoins, le Sénat occupe une place importante car il dispose de l’initiative des lois ainsi que de leur vote, ce qui leur permet d'influer considérablement sur les décisions des députés. Le Sénat contrôle donc en quelque sorte la chambre des députés, et peut provoquer sa dissolution par l’intermédiaire du Président de la République. Aussi, le Sénat ne peut être dissous, ce qui ajoute à sa supériorité.

Exécutif

Il existe une dualité au sein du pouvoir exécutif, qui s'exerce entre part le Chef de l’Etat et le Cabinet ministériel.

Nommé pour 7 ans par l’Assemblée nationale, le chef de l’Etat est indéfiniment rééligible, et irresponsable, sauf en cas de haute trahison. Au contraire, ses actes doivent être contresignés par un ministre qui en assume la responsabilité. Parmi ses attributions :

  • Il dispose de l’initiative des lois et les promulgue.
  • Il nomme aux emplois civils et militaires, dispose de la force armée (mais la déclaration de guerre ne avoir qu’après l’approbation des deux chambres).
  • Il ne peut procéder à une dissolution puisque la volonté du peuple, représentée par la chambre des députés, ne peut être discutée.

Les ministres sont quant à eux individuellement responsables de leurs actes devant les Chambres. Le principe de solidarité ministérielle donne une grande importance à la collégialité : tous les ministres sont unis par leur programme politique et par leurs actions. Néanmoins, si un comportement individuel est à l'origine d'une responsabilité, le principe de solidarité ministérielle ne s'applique pas.

La fonction de président du Conseil n’est alors pas instauré, après sa suppression par Louis-Napoléon Bonaparte en 1849. Ce n’est que le 9 mars 1876 que la fonction sera rétablie.

Les évènements qui se déroulent sous la IIIe République

La crise du 16 mai 1877

Jules Simon, républicain, est nommé président du Conseil en 1877. Mac Mahon est de son côté favorable à un système dualiste, dans lequel les ministres auraient à la fois la confiance du Parlement, et celle du président de la République.

Le 16 mai 1877, face à soumission du gouvernement (et donc du président du Conseil) devant la majorité républicaine élue plus tôt à la Chambre des députés, Mac Mahon lui envoie une lettre de blâme. Jules Simon démissionne alors de son poste, et le duc de Broglie prend sa succession. La Chambre, ajournée pour un mois, deviendra à nouveau très critique à l'égard de la tendance antiparlementaire de Mac Mahon, qui finira par la dissoudre. De nouvelles élections sont donc organisées et conduisent les Républicains à une nouvelle victoire. Face à cette situation, Mac Mahon démissionne le 30 janvier 1879. Jules Grévy est alors élu à sa place et fonde un pouvoir régi en grande majorité par les républicains.

Alors que Mac Mahon n’était pas parvenu à renforcer le pouvoir présidentiel, un certains nombre de mesures sont alors mises en place pour favoriser l’établissement d’un pouvoir plus fort au sein de la République. C’est dans ce cadre que Jules Ferry, ministre de l’instruction publique, vise à donner un nouveau visage républicain à l’école ; il instaure la gratuité de l’école primaire, et l’obligation d’aller à l'école de six à treize ans.

La « constitution Grévy »

Le nouveau président élu considère que les pouvoirs d’un chef de l’Etat doivent être limités. En effet, estimant que la volonté du peuple qui émane de ses représentants élus ne peut être contredite, il refuse la possibilité de toute dissolution. On a ainsi pu considérer que cette diminution du pouvoir présidentiel face au peuple se traduisait par la soumission de l’exécutif au législatif. Il en résulte un abaissement singulier de la fonction présidentielle. Aussi, la nécessité du contreseing abaisse le pouvoir du chef de l'Etat, dont les actions sont conditionnées par les décisions ministérielles.

Attentats anarchistes

La condamnation à mort d’un activiste anarchiste, Ravachol, en 1892, annonce le début d’une longue série d’attentats anarchistes. De nombreuses explosions et assassinats sont alors perpétrés : Auguste Vaillant, pour venger Ravachol, lance une bombe sur les députés, tandis qu'Emile Henry provoque une explosion dans un commissariat en 1892. Pour mettre un terme à ces violences, les lois scélérates sont votées dès 1893 ; elles sont destinées à prévenir les violences anarchistes en réprimant plus sévèrement ceux qui revendiquent leurs actes anarchistes. De même, toute propagande anarchiste est défendue, qu’il s’agisse d’une simple parole ou d’une incitation réelle.

Fin du siècle et Première Guerre mondiale

L’affaire Dreyfus a divisé la France de façon durable. En affirmant leur position, les partis se sont vivement opposés, ce qui a conduit le parti radical à prendre les rênes du gouvernement, porté par Emile Combes.

Longévité de la IIIe République

De nombreuses crises se sont succédées sous la IIIe République, et certaines d'entre elles ont permis au régime en place de perdurer. Ainsi, la fuite de Boulanger a entraîné une certaine perte de confiance dans les monarchistes ; c'est aussi une période initiée par une volonté de réformation et de révision constitutionnelle dès les années 1887-1889. La crise anarchiste a également été difficilement contenue par la IIIe République. L'affaire Dreyfus a au contraire provoqué un élan républicain en défendant les grandes valeurs républicaines (laïcité, défense des droits humains). Finalement, la République parviendra donc à se maintenir malgré les crises épisodiques.

La IIIe République est relativement instable ; les gouvernements tombent successivement (la question de confiance est généralement utilisée) tandis que le Parlement perdure.

Le régime dualiste est progressivement devenu moniste avec une prédominance du Parlement. Pour remédier à cet absolutisme parlementaire, R. Carré de Malberg propose de retirer la maîtrise de révision détenue par le Parlement, et d'instaurer un contrôle de constitutionnalité des lois afin d’éviter toute suprématie du pouvoir en place.

Avec la Première Guerre mondiale, le pouvoir exécutif a été renforcé, de façon relative. Les prises de décision devaient être rapides, et il était nécessaire d'attribuer au gouvernement un pouvoir législatif temporaire ; c’est par le biais des décrets-lois que le gouvernement a ainsi adopté certaines décisions.