Création de la IIIe République
La République est proclamée le 4 septembre 1870. Certains
députés républicains de Paris comme Jules Ferry ou Gambetta
l'appellent le « Gouvernement de la Défense nationale » ; c'est un
gouvernement provisoire issu de la capture de Napoléon III à Sedan,
consécutive de la défaite de la guerre de 1870 qui a conduit les
socialistes d’Auguste Blanqui à mener une insurrection contrée par
les républicains, dont Léon Gambetta.
Malgré cette avancée des Républicains, les élections de 1871
conduisent à une victoire des royalistes. Néanmoins, c'est aussi
une petite victoire des Républicains. Thiers est nommé « Chef du
pouvoir exécutif de la République française », par une loi du 31
août 1871. Mais l’importance quantitative des monarchistes semble
remettre en cause les intentions républicaines, tout comme le
régime parlementaire.
Ainsi, alors que la guerre contre la Prusse se poursuit, le
Président de la République, Thiers, signe la paix en 1871 avant
d'être contraint à la démission quelques temps plus tard. En effet,
l’Assemblée, de tendance monarchiste et conservatrice, souhaite
accroître son pouvoir sur celui du président et vote pour cela la
loi de Broglie le 13 mars 1873 qui permet d’atténuer les pouvoirs
de Thiers. Face au retour de la monarchie, Thiers affronte
l’Assemblée, qui votera finalement sa révocation. Mac Mahon, prend
provisoirement sa place ; il est donc nommé pour 7 ans (selon la
loi du septennat votée le 20 novembre 1873).
Le 30 janvier 1873 est voté l’amendement Wallon visant à
distinguer la présidence de la République de Mac Mahon :
l'amendement dépersonnalise le septennat et en fait une mesure
ordinaire. L’amendement stipule donc que « Le président de la
République est élu à la majorité absolue des suffrages par le Sénat
et la Chambres des députés réunie en Assemblée nationale. Il est
nommé pour sept ans ; il est rééligible. »
Caractéristiques de la Constitution
Le sentiment d’une instauration provisoire de la République en
vue d’un prochain retour à la monarchie a conduit à l’élaboration
d’un compromis entre la monarchie constitutionnelle et la
République. Ainsi, la Constitution de 1875 est peu structurée et ne
comporte que 34 articles, laissant à la coutume la mise en pratique
du reste. Sa procédure de révision est relativement facile à mettre
en pratique : « les Chambres auront le droit, par délibérations
séparées, prises dans chacune à la majorité absolue des voix, soit
spontanément, soit sur la demande du Président de la République, de
déclarer qu’il y a lieu de réviser les lois constitutionnelles ».
Les révisions devront être adoptées à la majorité absolue des
membres composant chacune des Chambres. L’initiative viendra du
Président de la République, ou de l’une ou l’autre des
Chambres.
Afin de satisfaire à des impératifs démocratiques et
républicains, mais pour renforcer le régime parlementaire, un
modèle de type orléaniste est envisagé.
Parlement
Cet organe se compose de deux chambres, celle des députés, et
celle des sénateurs. Ce bicaméralisme doit permettre de tempérer
l’un est l’autre des organes constitutifs du Parlement.
Le fonctionnement du Sénat est fixé par trois lois
constitutionnelles de 1875, qui font de cet organe le principal
contrebalancier du pouvoir des députés.
Composé de 300 membres, le Sénat comprend 75 membres nommés à
vie par l’Assemblée nationale lorsqu’elle élabore les lois
constitutionnelles, puis par le Sénat lui-même. Les 225 autres
sénateurs sont élus pour 9 ans, par un collège électoral au
suffrage universel indirect par les députés, les conseillers
généraux, etc. Leur mandat est renouvelable par tiers tous les 3
ans. L’âge minimum requis pour être élu est de 40 ans. La
répartition des sièges révèle la prédominance des campagnes sur les
villes, considérées comme conservatrices ; Gambetta veut donc créer
un « Grand Conseil des communes françaises ».
« Le pouvoir législatif s’exerce par les deux Assemblées ». Le
bicaméralisme doit créer un équilibre entre les deux chambres.
Néanmoins, le Sénat occupe une place importante car il dispose de
l’initiative des lois ainsi que de leur vote, ce qui leur permet
d'influer considérablement sur les décisions des députés. Le Sénat
contrôle donc en quelque sorte la chambre des députés, et peut
provoquer sa dissolution par l’intermédiaire du Président de la
République. Aussi, le Sénat ne peut être dissous, ce qui ajoute à
sa supériorité.
Exécutif
Il existe une dualité au sein du pouvoir exécutif, qui s'exerce
entre part le Chef de l’Etat et le Cabinet ministériel.
Nommé pour 7 ans par l’Assemblée nationale, le chef de l’Etat
est indéfiniment rééligible, et irresponsable, sauf en cas de haute
trahison. Au contraire, ses actes doivent être contresignés par un
ministre qui en assume la responsabilité. Parmi ses attributions
:
- Il dispose de l’initiative des lois et les promulgue.
- Il nomme aux emplois civils et militaires, dispose de la force
armée (mais la déclaration de guerre ne avoir qu’après
l’approbation des deux chambres).
- Il ne peut procéder à une dissolution puisque la volonté du
peuple, représentée par la chambre des députés, ne peut être
discutée.
Les ministres sont quant à eux individuellement responsables de
leurs actes devant les Chambres. Le principe de solidarité
ministérielle donne une grande importance à la collégialité : tous
les ministres sont unis par leur programme politique et par leurs
actions. Néanmoins, si un comportement individuel est à l'origine
d'une responsabilité, le principe de solidarité ministérielle ne
s'applique pas.
La fonction de président du Conseil n’est alors pas instauré,
après sa suppression par Louis-Napoléon Bonaparte en 1849. Ce n’est
que le 9 mars 1876 que la fonction sera rétablie.
Les évènements qui se déroulent sous la IIIe
République
La crise du 16 mai 1877
Jules Simon, républicain, est nommé président du Conseil en
1877. Mac Mahon est de son côté favorable à un système dualiste,
dans lequel les ministres auraient à la fois la confiance du
Parlement, et celle du président de la République.
Le 16 mai 1877, face à soumission du gouvernement (et donc du
président du Conseil) devant la majorité républicaine élue plus tôt
à la Chambre des députés, Mac Mahon lui envoie une lettre de blâme.
Jules Simon démissionne alors de son poste, et le duc de Broglie
prend sa succession. La Chambre, ajournée pour un mois, deviendra à
nouveau très critique à l'égard de la tendance antiparlementaire de
Mac Mahon, qui finira par la dissoudre. De nouvelles élections sont
donc organisées et conduisent les Républicains à une nouvelle
victoire. Face à cette situation, Mac Mahon démissionne le 30
janvier 1879. Jules Grévy est alors élu à sa place et fonde un
pouvoir régi en grande majorité par les républicains.
Alors que Mac Mahon n’était pas parvenu à renforcer le pouvoir
présidentiel, un certains nombre de mesures sont alors mises en
place pour favoriser l’établissement d’un pouvoir plus fort au sein
de la République. C’est dans ce cadre que Jules Ferry, ministre de
l’instruction publique, vise à donner un nouveau visage républicain
à l’école ; il instaure la gratuité de l’école primaire, et
l’obligation d’aller à l'école de six à treize ans.
La « constitution Grévy »
Le nouveau président élu considère que les pouvoirs d’un chef de
l’Etat doivent être limités. En effet, estimant que la volonté du
peuple qui émane de ses représentants élus ne peut être contredite,
il refuse la possibilité de toute dissolution. On a ainsi pu
considérer que cette diminution du pouvoir présidentiel face au
peuple se traduisait par la soumission de l’exécutif au législatif.
Il en résulte un abaissement singulier de la fonction
présidentielle. Aussi, la nécessité du contreseing abaisse le
pouvoir du chef de l'Etat, dont les actions sont conditionnées par
les décisions ministérielles.
Attentats anarchistes
La condamnation à mort d’un activiste anarchiste, Ravachol, en
1892, annonce le début d’une longue série d’attentats anarchistes.
De nombreuses explosions et assassinats sont alors perpétrés :
Auguste Vaillant, pour venger Ravachol, lance une bombe sur les
députés, tandis qu'Emile Henry provoque une explosion dans un
commissariat en 1892. Pour mettre un terme à ces violences, les
lois scélérates sont votées dès 1893 ; elles sont destinées à
prévenir les violences anarchistes en réprimant plus sévèrement
ceux qui revendiquent leurs actes anarchistes. De même, toute
propagande anarchiste est défendue, qu’il s’agisse d’une simple
parole ou d’une incitation réelle.
Fin du siècle et Première Guerre mondiale
L’affaire Dreyfus a divisé la France de façon durable. En
affirmant leur position, les partis se sont vivement opposés, ce
qui a conduit le parti radical à prendre les rênes du gouvernement,
porté par Emile Combes.
Longévité de la IIIe République
De nombreuses crises se sont succédées sous la IIIe
République, et certaines d'entre elles ont permis au régime en
place de perdurer. Ainsi, la fuite de Boulanger a entraîné une
certaine perte de confiance dans les monarchistes ; c'est aussi une
période initiée par une volonté de réformation et de révision
constitutionnelle dès les années 1887-1889. La crise anarchiste a
également été difficilement contenue par la IIIe
République. L'affaire Dreyfus a au contraire provoqué un élan
républicain en défendant les grandes valeurs républicaines
(laïcité, défense des droits humains). Finalement, la République
parviendra donc à se maintenir malgré les crises épisodiques.
La IIIe République est relativement instable ; les
gouvernements tombent successivement (la question de confiance est
généralement utilisée) tandis que le Parlement perdure.
Le régime dualiste est progressivement devenu moniste avec une
prédominance du Parlement. Pour remédier à cet absolutisme
parlementaire, R. Carré de Malberg propose de retirer la maîtrise
de révision détenue par le Parlement, et d'instaurer un contrôle de
constitutionnalité des lois afin d’éviter toute suprématie du
pouvoir en place.
Avec la Première Guerre mondiale, le pouvoir exécutif a été
renforcé, de façon relative. Les prises de décision devaient être
rapides, et il était nécessaire d'attribuer au gouvernement un
pouvoir législatif temporaire ; c’est par le biais des décrets-lois
que le gouvernement a ainsi adopté certaines décisions.