La politique

Si « les élections encouragent le charlatanisme », elles doivent également être le moment de la sincérité, face à des électeurs qui attendent qu’on réponde à leurs attentes. Mais toute vérité n’étant pas bonne à dire, la fin de la politique serait-elle de parvenir à ses fins, peu importent les moyens, comme le préconise Machiavel dans Le Prince ? L’autorité du pouvoir politique reposerait alors sur des bases instables, puisque fondée sur de fausses vérités, un discours officiel « alimenté par la langue de bois ». Pour Alain Renault au contraire, « l’autorité, c’est le pouvoir plus la reconnaissance de la légitimité ».

Fiche : L'Etat
fiche

Ainsi, si gouverner serait plus facile dans un cadre transparent, il parait parfois difficile de concilier les intérêts généraux avec l’exigence de transparence que semblent souvent exiger les peuples.

La morale comme fin de la politique

L’évolution des régimes politiques dans le monde laisse penser que la transparence, si elle constitue « la vertu des belles âmes » pour Rousseau, n’est pas usitée par nombre de dirigeants. L’Ancien Régime manifeste notamment l’obscurantisme du pouvoir, caché derrière l’image de grandeur du politique. Ce n’est qu’avec l’avènement du système républicain, et la démocratie que la morale semble devenir une fin de la politique. La massification de l’enseignement et avec elle l’émergence de la culture du peuple le conduit à entrer dans la « chose publique », et à exiger des garanties, alors même que le mandat impératif n’existe pas.

Fin de la politique pour Rousseau, la morale constitue une source de crédibilité importante aux yeux de la population, qui l’estime importante. On a en effet pu montrer que ce que les russes reprochaient à leur gouvernement pendant la guerre froide n’étaient pas les goulags ou les procès staliniens, mais le mensonge consistant à faire croire à une vie meilleure, longtemps espérée par la population d’URSS.

L’Etat, pour Platon, « agit selon le bien ». La volonté de bien constitue l’un des fondements de l’Etat qui doit effectuer un certain nombre d’actions positives en faveur se sa population. Conciliateur des intérêts particuliers et généraux selon Hegel, l’Etat doit être transparent. Platon réclame ainsi la transparence dans les affaires politiques, même si la sincérité reste une lourde tâche en politique.

Le peuple estime généralement, et encore actuellement, que la politique est bien éloignée des préoccupations populaires. Si les efforts de décentralisation ont été faits en 1982 puis en 1992, cela ne limite pas pour autant l’éloignement des politiques, qui œuvrent parfois davantage pour la promotion économique locale que pour l’intérêt général de leur population. Par nature immoral, le politique étant loin des réalités sociales, le pouvoir ne peut être que tyrannie selon Alain.

Enfin, certaines mesures ont été, de façon ponctuelle, mises en place afin de développer la transparence dans les affaires politiques. La Société des Nations tout juste née en 1919 déclare ainsi que les relations diplomatiques devront être mises au grand jour, car ces dernières avaient pu être considérées comme source partielle de la première guerre mondiale.

Vérité et politique

Si pour Jaurès « le courage est de chercher les vérité et de la dire », il n’est pas toujours opportun de dire la vérité lorsqu’on exerce des fonctions politiques. Les évènements politiques et économiques conduisent parfois à user de la « langue de bois » (R. Aron), à tempérer certains heurts.

L’on peut prôner l’emploi de la ruse en politique, parfois nécessaire pour parvenir à ses fins. C’est ainsi que Machiavel considère que le Prince peut mettre en œuvre tous les moyens dont il dispose dans sa quête du pouvoir. Poursuite concurrentielle du pouvoir, la campagne politique n’est pour Schumpeter que le seul objet de la politique, qui n’agit pas selon la volonté de la population.

Cette conception du politique, manœuvrant pour l’accession au pouvoir, explique l’usage du mensonge en politique. Lorsque Ségolène Royal, après sa victoire aux primaires en 2007, déclare « je n’en tire aucune gloire personnelle », elle fait croire qu’elle n’œuvre que dans l’intérêt commun.

Aussi, les périodes économiques néfastes obligent à ne pas expliquer les détails d’une politique économique, qui sans cela deviendrait souvent inefficace. Certaines anticipations des agents économiques peuvent conduire à limiter les effets bénéfiques d’une politique de relance ou à créer ce qu’on appelle une prophétie autoréalisatrice.

De façon générale la politique utilise l’euphémisme voire le mensonge, et les périodes électorales sont autant de moments enclins à la tromperie. Comme l’annonçait Clémenceau, « on ne ment jamais tant qu’avant les élections ». La population considère désormais habituelle et quasi naturelle l’utilisation du mensonge lors des élections puisque cela peut engendrer un accroissement de l’abstention, les électeurs estimant inutile leur participation à la chose publique. La perte de crédibilité des électeurs constitue en effet une partie de l’explication du phénomène abstentionniste.

Si « Les élections encouragent le charlatanisme » (Ernest Renan), elles ne doivent pas aller jusqu’à la perte de crédibilité de leurs électeurs. Les politiques usent ainsi désormais d’autres méthodes, pratiquant la transparence. De cette façon, on a pu rendre plus transparente la nomination du président du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel.