Dans les années 1980 en France, on connaît en effet déjà les
risques du diesel sur la santé. Dans d’autres pays, les experts
mettent également en garde contre ces risques. Au Japon, de
nombreuses victimes du diesel sont même allées jusqu’à se regrouper
pour faire plier l’industrie automobile japonaise ; aujourd’hui,
les voitures diesel y sont interdites. Pourtant, pendant ce temps,
la France continuait à favoriser l’acquisition de voitures
diesel.
Les risques du diesel
Les véhicules diesel rejettent des particules fines susceptibles
d’atteindre et de rester au contact des poumons. Cela peut
provoquer des atteintes fonctionnelles respiratoires, de l’asthme,
mais aussi des cancers du poumon.
Depuis l’arrivée massive des moteurs diesel, on assiste ainsi en
France à un accroissement de l’asthme juvénile et des maladies
respiratoires dans les villes. Au-delà de ces maladies liées au
système respiratoire, il a été soupçonné que les particules
pouvaient avoir des effets thrombotiques et être impliquées dans la
survenance de certaines maladies neurodégénératives.
Les automobilistes sont les premières victimes de cette
pollution en absorbant d’importantes quantités de particules qui
passent par les prises d’air des ventilations de leur véhicule.
L'expansion des voitures diesel
A l’origine, le diesel était réservé à ceux qui roulent beaucoup
: taxis, routiers. Moins cher en raison des taxes limitées qu’on
lui appliquait, le diesel n’en était pas pour autant moins cher à
produire. Mais forts de cet avantage fiscal, routiers, taxis et
agriculteurs n’ont eu de cesse de bloquer le pays à chaque
élévation des prix du pétrole, renforçant ainsi le poids du diesel
en France. De plus, de puissants lobbies automobiles ont incité les
gouvernements successifs à développer l’avantage fiscal du diesel,
notamment pour prendre de l’avance sur la concurrence
internationale en la matière. Le développement du diesel résulte
donc d’une volonté industrielle et politique, en lien avec
l’industrie nucléaire, qui cherchait à écouler la surproduction de
gazole.
Dominique Voynet, ministre de l’environnement de 1997 à 2001, a
ainsi dénoncé le poids du lobbying, notamment celui de Peugeot sous
la houlette de Jacques Calvet, PDG du groupe de 1983 à 1997. Pour
Corine Lepage, ministre de l’environnement de 1995 à 1997, le
lobbying a totalement anéanti les avancées de la loi sur l’air.
Pendant longtemps, beaucoup d’automobilistes ont ainsi cru que le
diesel polluait moins que l’essence, ce qui les a confortés dans
leur choix économique : la voiture diesel coûte plus cher, mais
elle consomme moins, et le diesel est moins cher à la pompe.
Le diesel a également été favorisé pour ses moindres effets sur
le réchauffement climatique (mise en place d’un bonus-malus
écologique). Ainsi, dans la lutte contre le changement climatique,
l’effet du diesel sur la santé a été écarté, laissant ainsi le
marché automobile accroître sans mesure ses ventes de voitures
diesel alors que d’autres pays cherchaient déjà à les limiter.
La France dépendante
Alors que les voitures diesel représentaient 3% des véhicules en
1980, elles représentent 60% des ventes de l’industrie automobile
trente ans plus tard.
Pour répondre au besoin croissant de diesel, la France a été
contrainte d’en importer ; à l’inverse, le pays exporte de
l’essence vers le Nord de l’Europe et vers les Etats-Unis.
Et maintenant ?
Les constructeurs automobiles ont été contraints de réagir face
à l’apparition de nouvelles normes ; de 140 mg/km de particules
autorisé en 1992, la France est passée à 5 mg/km en 2009. Ainsi, en
installant des filtres à particules sur ses véhicules, PSA est
parvenue à respecter la réglementation ; ces filtres laisseraient
néanmoins passer des particules plus fines, plus nocives.
Mais interdire les voitures diesel en France provoquerait un
cataclysme. Le gazole représente 80% du carburant vendu en France,
et en trente ans, le nombre de véhicules diesel est passé de 1,7
millions à plus de 24 millions.
La France est aujourd’hui en contentieux avec la Commission
européenne, qui pourrait la sanctionner pour non-respect des normes
d’émission de particules fines. Le comité sur la fiscalité
écologique a néanmoins adopté un avis proposant un rééquilibrage de
la taxation sur les carburants, se conformant ainsi aux demandes de
la Commission. Malgré cela, certains annoncent un scandale
sanitaire comparable à celui de l’amiante.