Le droit maritime a longtemps été coutumier ou
conventionnel. Ce n’est qu’en 1982 avec la Convention de Montégo
Bay (Convention des Nations Unies pour le droit de la mer (CNUDM))
qu’un droit de la mer va véritablement être défini. Ainsi va naître
la Zone Economique Exclusive (ZEE), zone de 200 milles nautiques à
laquelle appartient désormais l’Etat frontalier. Quant aux fonds
marins, ils devenaient un patrimoine commun de l’humanité. Au-delà
des 200 milles en effet, la mer devenait un espace international.
Si ce droit international a donc écarté l’idée d’une égalité
pratique entre États au profit de droits accordés aux États
côtiers, ceux-ci ne disposent pas tous de moyens suffisants leur
permettant d’exercer leurs compétences. Les mers et océans
demeurent donc des espaces où l’ordre public est peu
respecté.
Les espaces océaniques sont le lieu d’affrontement des
puissances étatiques autant que des entités non-étatiques en raison
des ressources qu’ils contiennent. Gisements de minerais
sous-marin, ressources piscicoles, mais aussi hydrocarbures
constituent autant de ces ressources cruciales inégalement
réparties à la surface du globe et qui font de l’espace maritime un
lieu stratégique situé au cœur d’enjeux cruciaux. Les sources de
pétrole situées sous la mer (gisements dits off-shore) font par
exemple l’objet d’explorations.
Quant au fond des mers, et au-delà des 90 % de richesses qu’il
reste à y découvrir, ils constituent aussi un enjeu de taille en
raison des 400 cables qui y sont présents pour faire transiter des
données. Installés le long des grandes routes maritimes, ces cables
traversent des zones placées sous la juridiction d’Etats, à
commencer par les Etats-Unis. Beaucoup des données internationales
transitent ainsi sur le territoire américain, ce qui interroge la
souveraineté des détenteurs de ces données; cela pose d’autant plus
de questions que les géants du numériques investissent sur le
marché des cables.
Face à ces atteintes à la souveraineté portées par le pouvoir
croissant de ces entités privées ou publiques, certains pays du Sud
ont œuvré dans le sens d’un renforcement de leur autonomie en la
matière. Ainsi du Brésil, qui a affiché sa volonté de renforcer sa
souveraineté numérique en reliant par cable son pays à des Etats
africains. De même, des cables ont été installés entre le Venezuela
et Cuba.
On constate ainsi que mers et océans jouent un rôle crucial de
mise en relation, dans le domaine du numérique donc, mais aussi, et
depuis des siècles, dans celui du transport de marchandises. La
circulation de matières premières, comme celle de biens
manufacturés, constitue en effet un enjeu de taille dans le cadre
d’une économie-monde où les pays demeurent très énergivores. Il
s’agit d’un enjeu d’autant plus vital lorsqu’il s’agit
d’hydrocarbures. Or le pétrole est le produit le plus échangé et
son transport représente donc le trafic maritime le plus important.
Son transit provoque régulièrement des tensions dans certaines
zones stratégiques.
En 2021, de vives tensions entre l’Iran et les
États-Unis sont apparues dans la région du détroit d’Ormuz, l’un
des passages les plus stratégiques au monde. Situé entre le golfe
Persique et le golfe d’Oman, ce détroit par lequel transitent
d’immenses quantités d’hydrocarbures, est crucial pour
l’exportation du pétrole des grands producteurs mondiaux (Émirats
arabes unis, Iran, Arabie saoudite, Irak et Koweït) vers les
industries de transformation.
Les passages maritimes constituent donc des lieux stratégiques
depuis que les hommes et les richesses circulent par la voie
maritime, que ces passages soient naturels (détroit de Gibraltar,
cap de Bonne-Espérance, etc.) ou artificiels (canal de Suez, canal
de Panama, etc.).